Conflit du bois d'oeuvre : Discorde de bois
Reporter réalisateur :
Eddy Verbeeck
2 mars 2003

En plus d'avoir à faire face à des difficultés financières, l'industrie du sciage a été confronté à une nouvelle réalité: l'arrivé du bois européen sur le marché américain.


La guerre du bois...

Le bois d'oeuvre est une pièce maîtresse de l'échafaudage économique du Québec: des exportations de deux milliards de dollars, principalement vers les États-Unis. En temps normal, cette industrie représente plus de
38 000 emplois.

Il y a près d'un an, le Département américain du commerce imposait une surtaxe de 27% sur le bois d'œuvre canadien traversant la frontière. Selon nos voisins du sud, le fait que notre forêt soit à 80% propriété publique fausserait le jeu de la concurrence. (voir capsule info)

«Comme notre forêt est essentiellement publique, l'état décide qui a accès à quoi, quand et comment on y a accès. On a une situation inverse d'une forêt où l'accès est fixé par des contraintes de marché.» Luc Bouthillier, professeur en politique forestière, Université Laval

Depuis, des négociations ont eu lieu entre la Coalition américaine des producteurs de bois d'œuvre et des représentants du gouvernement canadien. Mais pendant qu'on cherche à s'entendre, la surtaxe s'applique. Et cette mesure fait très mal à notre industrie.

La nouvelle taxe est le fruit de l'intense campagne que mènent depuis plus d'un an les lobbies des producteurs américains de bois d'oeuvre, pour qui les modalités du droit de coupe accordées aux compagnies canadiennes constituent une subvention illégale.

Mais son véritable élément déclencheur a été mis à nu par les accusations répétées que les compagnies canadiennes accaparaient une part «exagérée» du marché américain.

Tiré de : World Socialist Web Site

 

Lot de dommage pour le Québec...

Les mesures compensatoires imposées par Washington ont eu deux effets négatifs majeurs: fragiliser la situation financière des entreprises et diminuer les parts de marché du bois canadien aux États-Unis.

Si cette surtaxe a épargné peu de provinces, c'est au Québec qu'elle a fait le plus de ravages. «Nos exportations aux États-Unis ont diminué d'environ 20%. Ça nous touche directement et très durement.» Jacques Gauvin, D.G. Conseil de l'industrie forestière du Québec

Depuis les douze derniers mois,
6 000 travailleurs québécois ont été mis à pied, soit un cinquième de la main-d'oeuvre de cette industrie. Seul un marché de la construction vigoureux dans la province a permis d'éviter une crise plus sévère encore.


Pour les autres provinces...

Contrairement au Québec, la Colombie-Britannique a connu une légère hausse de ses exportations. C'est le plus gros joueur canadien: la moitié des exportations de bois d'oeuvre vers les États-Unis provient de la Colombie-Britannique.

Malgré cette apparente performance, 28 usines de sciage ont déclaré faillite depuis un an. Mais d'autres ont produit plus, ce qui a aidé l'ouest à se tenir la tête hors de l'eau.

Le Nouveau-Brunswick est une exception. Cette province n'est pas soumise aux droits compensateurs : la moitié des forêts de la province est du domaine privé. Pour les Américains, ça en fait un marché de libre concurrence.

Le Québec est le deuxième producteur de bois au Canada, avec 25% de la production.

La Colombie-Britannique est le plus gros joueur canadien: la moitié des exportations de bois d'oeuvre vers les États-Unis provient de cette province.

 

Un marché ouvert aux compétiteurs...

En plus d'avoir à faire face à des difficultés financières, l'industrie du sciage a été confronté à une nouvelle réalité. L'arrivé du bois européen sur le marché américain.

«Certaines parts de marché vont être très difficile à récupérer. On a des pays compétiteurs en Europe qui sont maintenant sur nos marchés traditionnels.» Luc Palmer, PDG Crête et fils

Les pays tiers occupaient moins de 1% des importations américaines de bois d'oeuvre en 1995. Aujourd'hui, ils y occupent 4%.

Des américains déçus ?

Pourtant, l'objectif américain de faire monter les prix n'a pas fonctionné. En rendant le prix du bois canadien moins compétitif par une taxe, la rareté du bois sur le marché aurait dû faire monter les prix. Mais ça n'a pas été le cas.

Le marché américain a été inondé par le bois européen, d'une part, et par l'augmentation de la production intérieure, d'autre part. Résultat : les prix ont chuté à leur plus bas niveau depuis dix ans.

En attente d'une décision

Depuis mai 2002, tout l'argent perçu de cette surtaxe de 27% est versée dans un compte en fiducie jusqu'à ce que les négociateurs s'entendent. À ce jour, on y a déposé plus d'un milliard de dollars.

Les industriels américains espèrent bien pouvoir investir cet argent dans leurs usines, alors que le Canada compte bien le récupérer.

Rappelons qu'un recours a été déposé par le Canada à l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Évidemment, on souhaite qu'on renonce à ce recours. Pour l'instan,t tout le monde reste sur ses positions.

 

La saga judiciaire à propos du bois d'oeuvre remonte à 1982, date à laquelle les États-Unis accusent pour la première fois le Canada de subventionner son industrie forestière.

Source: Forêts publiques et vices privés



HYPERLIENS

Organisation Mondiale du Commerce (OMC)

World Socialist Web Site

Droits américains sur le bois d'oeuvre canadien
(Série d'articles sur cyberpresse)

Forêts publiques et vices privés




Au coeur du litige...

Les États-Unis accusent le Canada de concurrence déloyale.

Notre forêt est à 80% propriété publique, ce qui fausserait le libre marché de l'offre et de la demande pour notre bois.

«En 1987,dans un but d'équité, le Québec a mis en place une loi qui avait pour objectif d'établir la redevance à partir d'un marché privé du Québec.» Del Degan

En somme, le Québec affirme fixer les redevances qu'il demande aux industriels du bois d'oeuvre en se basant sur les prix en vigueur dans le secteur privé.

Le problème, c'est que presque la totalité des forêts privés de la province sont situées dans le sud alors que nos forêts publiques sont surtout dans la partie nord du Québec.

Entre le prix du bois sur le marché privé et la redevance imposée aux entreprises forestières, il faut tenir compte des coûts d'exploitation.

Plus on va chercher la ressource loin au nord, plus ça coûte cher, et moins le montant à verser au gouvernement sera important.

Il s'agit de laisser une marge de manoeuvre aux entreprises qui doivent construire des routes pour accéder à la ressource.

Résultat: la redevance versée par l'industriel québécois à l'état est beaucoup moins élevée que le prix payé par un industriel américain pour un arbre.

Les Américains disent que c'est une subvention déguisée, ce qui est illégal dans les règles du commerce international.

 

Visionnez notre reportage «Discorde de bois».