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Le Centre hospitalier de l'Université de Montréal
a annoncé le décès, lundi après-midi,
de Pierre Bourgault, homme bien connu des milieux politique,
journalistique et des communications. M. Bourgault avait
été admis à l'Hôtel-Dieu du CHUM
le 8 juin 2003, en état de détresse respiratoire
résultant d'une maladie pulmonaire chronique obstructive.
Écoute
du reportage
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Dans
les années 1960, Pierre Bourgault a incarné
le rêve et le projet de l'indépendance. Il
dénonçait les injustices, défendait
la langue et plaidait pour l'abolition de la peine de mort.
Dernier président du Rassemblement pour l'indépendance
nationale, Pierre Bourgault avait été candidat
pour le RIN dans le comté de Duplessis, en 1966,
et avait remporté 39 % des voix. En 1968, pour
servir la cause de l'indépendance, Pierre Bourgault
avait proposé aux militants, profondément
attachés comme lui au RIN, de saborder le parti pour
se joindre au Parti québécois. Il dira plus
tard que ce sabordage avait été la plus grave
erreur politique de sa vie. Écrivain, polémiste
et même comédien, Pierre Bourgault savait soulever
les foules. Ses différends avec René Lévesque
seront légendaires. Déçu par l'étatisme
prôné par Lévesque, il quittera le PQ
avec fracas en 1981. Il reprendra du service pour le référendum
de 1995, avec Jacques Parizeau.
Pierre
Bourgault est né à East Angus en 1934. Il
disait avoir fait de la politique par hasard et qu'il n'était
pas un indépendantiste de carrière. Il disait
aussi avoir eu 20 ans de vie politique et 20 ans de réflexion.
Au cours de sa carrière politique, il s'est exprimé
dans toutes les tribunes. Il a prononcé des centaines
de discours, des textes parfois improvisés, mais
toujours enflammés, qui captivaient son auditoire.
Il a aussi été chroniqueur-journaliste à
la presse écrite, à la radio et à la
télévision. Pierre Bourgault a également
été professeur en communication à l'Université
du Québec à Montréal. Il a été
récompensé par le gouvernement du Québec,
qui lui a décerné, en 1997, le prix Georges-Émile
Lapalme pour saluer sa contribution à la défense
du français et à son rayonnement.
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La
dernière entrevue de Pierre Bourgault |
Souverainiste de la première heure,
tribun convaincant, homme d'esprit et de lettres,
les hommages n'ont pas cessé aujourd'hui.
On a beaucoup parlé de lui, mais ce soir,
Le Point le laisse parler de lui-même.
Voici quelques extraits d'une entrevue que Pierre
Bourgault accordait à Denise Bombardier
en 1993, à l'émission Raison
Passion.
Écoute
de l'extrait de l'émission Raison
Passion
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Reconnu
comme un homme qui ne retenait pas sa colère,
il a avoué n'avoir jamais essayé de
s'assagir, croyant que l'âge le rendrait plus
calme. Par contre, dans les dernières années
de sa vie, ses colères n'étaient plus
ce qu'elles avaient déjà été.
Il jugeait quelles étaient devenues plus saines,
plus rationnelles et plus utiles. « Ma
colère est nourrie par un désir de justice
et de liberté », a-t-il commenté.
L'écriture lui permettait, par ailleurs, de
réfléchir davantage, tout en dénonçant
ouvertement toutes formes « d'esclavage ».
Du temps de sa carrière politique, il monopolisait
des foules entières. En faisant le saut dans
le monde médiatique, il n'a pas cessé
de manifester son indignation, mais les résultats
ne sont plus les mêmes. Est-ce que la société
québécoise a changé? Selon lui,
les foules continuent à s'accorder à
ses propos, mais ne le manifestent plus de la même
façon. Il n'y a tout simplement plus « de
débats publics ». Pourquoi? Pour
lui, les Québécois francophones ont
« une drôle de nature ».
Ils conçoivent difficilement qu'une discussion
puisse être farouchement argumentative, sans
être le fruit d'une colère personnelle.
Il est pourtant nécessaire, parfois, de se
battre avec des mots pour faire avancer de nouvelles
idées. « On me dit : "Tu
veux toujours gagner". Évidemment! J'apporte
mes arguments et on verra bien qui a raison! »,
lance-t-il.
Pendant
cette entrevue qu'il a accordée à Denise
Bombardier, il a exprimé ce qu'il aimerait
qu'on garde de lui, ce qu'il aimerait laisser derrière
lui. « Ce que je pense avoir apporté,
c'est la volonté absolue et inébranlable
d'arriver à plus de justice et plus de liberté.
L'indépendance du Québec, pour moi,
ça n'est rien en soi. Je ne suis même
pas nationaliste. Moi, ce qui m'affecte, c'est le
sentiment d'injustice dans lequel vivent les Québécois
à l'intérieur de la Fédération
canadienne. » Ardent défenseur
de la langue, il est fier de la place qu'a pris le
français dans toutes les sphères de
la société québécoise.
Il ne reste plus qu'à en améliorer la
qualité!
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Commentaires de
Bernard Landry
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On
dit que Pierre Bourgault aurait prononcé 3500 discours
pendant sa vie. Que voudrait-il que l'histoire retienne
de lui? Stéphan Bureau a posé cette question
au chef du Parti québécois, Bernard Landry.
Écoute
de l'entrevue
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Pour Bernard Landry, visiblement attristé de la
nouvelle, cette journée en est une de « deuil
profond ». Pierre Bourgault était pour
lui un ami, un camarade de lutte, mais aussi un conseiller
très précieux. Alors que plusieurs disent
de Bourgault qu'il était difficile, Bernard Landry
préfère dire qu'il était un homme rigoureux,
sans complaisance.
Pour Bernard Landry, ce qu'on retiendra de Bourgault, « c'est
ce que sa vie a donné. Son courage, sa persévérance,
sa fidélité venaient consolider ses discours
et les rendre crédibles ». Le chef
du PQ rappelle que, pour Bourgault, sa cause passait bien
avant lui.
L'ancien
premier ministre a aussi loué l'intérêt
que portait Pierre Bourgault à la condition québécoise.
« Il a été le précurseur
de René Lévesque! » Sans Bourgault,
le modéré René Lévesque n'aurait
pas eu de tribune.
« Les souverainistes d'aujourd'hui
doivent se souvenir avec émotions de ce qu'ils doivent
à Pierre Bourgault, à son courage et à
ses sacrifices », conclut Bernard Landry.
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