« Il ne faut pas nécessairement
fermer les portes. Il faut aller les explorer soi-même
et se faire sa propre idée. La science ne va pas nécessairement
tout expliquer. » -
Dr Félix Nguyen, radio-oncologue
« Il est sûr qu'une
attitude négative, une attitude d'abandon, de défaitisme,
ce n'est pas une attitude pour aider son corps à trouver
le chemin de la guérison. Je suis totalement convaincu
de ça. »- Yvon Thiboutot, comédien
« C'est un peu guérir
sa vie dans le fond. Ce n'est pas juste guérir d'une
maladie, c'est guérir l'ensemble de sa vie pour être
bien, finalement. »-
Isabelle
« Le patient, même
s'il vit quelque chose d'épouvantable, si vous l'écoutez,
vous venez de faire 80 % du travail. Vous venez de tout
désamorcer. » - Dr Félix Nguyen
« On est passé
de 50 % de cas d'hospitalisation à près
de 20 %. Les gens restaient en moyenne 3 semaines, donc
21 jours, alors que depuis qu'on a l'équipe, ils restent
à l'hôpital 4 ou 5 jours, en moyenne. »
- Dr Félix Nguyen
Vivre avec le cancer
et garder le moral : c'est le défi que se lancent
des milliers de Québécois, convaincus qu'ils
ont le pouvoir de se guérir, de s'autoguérir.
Un grand nombre d'entre eux cherchent des moyens d'améliorer
leur attitude pour arriver à renforcer leur système
immunitaire. Qu'en pensent leurs médecins? Notre
système de santé peut-il se permettre de soigner
plus que le corps?
Le
bureau du vice-président aux ressources humaines
chez Labatt est étrangement vide depuis plusieurs
mois. Daniel Carrière a été
frappé par le cancer, alors même qu'il était
dans la force de l'âge. Joueur de hockey et de golf,
il s'entraînait trois fois par semaine.
En bon gestionnaire,
il s'est fixé comme objectif la guérison
complète, et pour y parvenir, il a fait entièrement
confiance à son médecin. Pour lui, il n'y
a pas de doute : son médecin lui a sauvé
la vie.
« Le Dr Nguyen a ce côté beaucoup
plus humain, plus spirituel. »
Un médecin du corps et de l'esprit
Félix
Nguyen, 34 ans, est radio-oncologue. Formé en
Californie à la fine pointe de la technologie, il
est revenu à Montréal avec des idées
avant-gardistes qui tranchent avec notre système
de santé, ses listes d'attentes et ses rendez-vous
expéditifs.
« Qu'est-ce
qui arrive, justement, si on conditionne nos patients à
avoir des visualisations positives? Après tout, ça
marche pour les athlètes! J'aimerais explorer ça.
Si ça ne change pas le devenir, du moins, peut-être
que ça sera plus facile pour eux de passer à
travers leurs traitements, de faire en sorte que leur douleur
soit moins intense », estime-t-il.
Le Dr Nguyen est en train de bouleverser la façon
de traiter les personnes atteintes de cancers à la
tête et au cou à l'hôpital Notre-Dame
de Montréal. Pour lui, il n'y a pas de doute :
le moral a un rôle important à jouer dans la
guérison.
Sous le chapeau,
Félix Nguyen, participant
à la Course destination monde il y
a 10 ans. Une expérience qui a façonné
sa pratique de la médecine.
« Moi, je
trouve ça inconcevable de penser que le corps humain
ne tient qu'à un phénomène physique. »
- Dr Nguyen
Guérir son âme
Isabelle Duval a appris la terrible nouvelle la veille
de Noël 2001 : cancer du sein inflammatoire
avec métastases aux os et au foie. C'est un choc
pour elle, qui a toujours pris soin de son corps en mangeant
bien, en faisant de l'exercice et en évitant la
cigarette. Mais Isabelle croit avoir négligé
l'essentiel : ses émotions. Son cancer, elle
l'a perçu comme un cri... du corps.
« Il
y avait un déséquilibre et je le sentais.
Sauf que je ne l'ai jamais écouté. Cette
maladie m'a amenée à me dire : Il
est temps que tu t'écoutes, parce que ça
risque de t'emporter. » - Isabelle
Une
chose lui a sauté aux yeux : ses études
universitaires, ses bons emplois, elle les avait toujours
choisis pour faire plaisir aux autres. Avec la maladie,
Isabelle-la-guerrière a décidé de
changer de vie et de se prendre en main. Elle a suivi
à la lettre ses traitements, mais
a refusé net de s'en remettre passivement à
la médecine traditionnelle.
Isabelle
est de ceux et celles qui croient aux processus d'autoguérison.
Écho, biologie totale, reiki, visualisation, imagerie
mentale, elle a tout essayé, ou presque. Mais elle
dit miser d'abord et avant tout sur le maintien de son
moral : « Je me suis accrochée
au positif tout de suite, en commençant à
lire des livres d'histoire de gens qui s'en sont sortis.
Je ne voulais rien savoir des statistiques. »
Sans sa famille et ses amis, Sylvie Boisvert ne sait
pas comment elle aurait pu traverser les deux ans et demi
d'enfer qu'elle vient de vivre. Elle a reçu son diagnostic
le jour de ses 36 ans. Un cancer du sein très agressif,
et incurable.
Sylvie
a toujours été une pessimiste. Son combat
contre le cancer, elle le mène donc sur deux fronts :
elle lutte non seulement contre sa maladie, mais aussi contre
sa propre nature. Elle qui s'attend toujours au pire, elle
est convaincue que c'est son état d'esprit qui a
causé sa maladie.
« Je
pense vraiment que c'est moi qui ai créé le
cancer avec le stress. Parce que je n'ai jamais pris d'alcool,
je n'ai jamais fumé, j'ai eu une alimentation parfaite.
Alors, qu'est-ce qui reste? Le stress et l'anxiété. »
- Sylvie
« Le
stress est nécessaire, mais pas nécessairement
suffisant pour développer la maladie. Alors pour
moi, on ne se donne pas la maladie, mais il y a des moments
de vie où l'on est à ce point vulnérable
que la maladie, si elle a à s'exprimer, va arriver. »- Dr Marie-Andrée
Ouimet, psychiatre, Centre hospitalier de St. Mary
« Je pense
qu'il est très important que les patients croient
en leurs capacités de guérison. C'est une
partie importante du traitement. Si le patient ne croit
pas qu'il va guérir ou améliorer sa condition,
il y a peu de chances que ça se produise. »
- Dr Jaroslav
Prchal, directeur, Département d'oncologie,
Centre hospitalier de St. Mary
Une équipe à l'écoute des patients
Félix Nguyen et son équipe ont vite
réalisé qu'ils devaient absolument s'occuper
du moral de leurs patients parce qu'ils en perdaient trop.
Et la nouvelle approche dans les hôpitaux leur a forcé
la main :
« On
nous a demandé de guérir le plus de patients,
d'hospitaliser le moins possible, et d'en voir le plus possible.
[...] Ce qui est arrivé, c'est qu'on s'est rendu
compte que oui, c'était possible, mais qu'on faisait
juste traiter la maladie, pas la personne. Et que derrière
cette personne, il y avait des besoins, un contexte familial,
un contexte social. »
Tous
les jeudis matin, médecins, infirmière,
psychologue, travailleuse sociale, orthophoniste et
nutritionniste partagent leurs informations. L'objectif
de ce comité multidisciplinaire : s'assurer
que le moral du patient tient le coup.
Pour lancer cette initiative, le Dr Nguyen a remué
ciel et terre. Et il continue de se démener pour
trouver l'argent qui lui permettra d'agrandir son équipe.
Son principal atout : des résultats étonnants.
« On ne devrait pas travailler aussi fort pour
obtenir le peu de choses qu'on a eu, car c'est tellement
simple! [...] Ça revient juste à retourner
à la base, qui est de traiter son patient et de faire
en sorte qu'il se sente bien dans son cheminement. »
- Dr Félix Nguyen
Retourner
à la base. Injecter une dose d'humanité dans
un système de santé malmené par des
années de compressions budgétaires. Et si,
en soignant à la fois le corps et l'esprit, on faisait
d'une pierre deux coups? Une meilleure qualité de
vie pour le malade et des économies pour le système.