Première
partie du vidéo
Deuxième
partie du vidéo
Est-on père parce qu'on
a eu une relation sexuelle avec une femme qui est devenue
enceinte, même si on ne le voulait pas et on ne le savait
pas? Reste-t-on père si l'on découvre que nos
enfants ne sont pas biologiquement les nôtres? Être
père, c'est être le géniteur ou celui
qui aime et s'occupe des enfants?
« C'est
la seule et unique fois que j'ai fait l'amour avec cette femme
sans condom. »
Pierre, 37 ans, est sûr de s'être
fait rouler. Mais avec l'ADN, impossible pour lui de nier
sa paternité. Il a été poursuivi, on
lui réclame une pension alimentaire. Lui qui avait
pourtant dit à son ex-conjointe que si elle gardait
l'enfant, il ne s'en occuperait pas : « On
n'impose pas d'enfant à personne », dit-il.
Même si Pierre a refait sa vie, il n'a jamais eu d'autres
enfants. Il n'a d'ailleurs jamais voulu voir le sien. Comme
18 % des hommes au Québec, il refuse de payer
sa pension alimentaire. Il préfère travailler
au noir pour ne pas déclarer de revenus.
« Tu deviens enragé en dedans.
Tu te dis : On ne me le demande pas. Je ne suis
pas un donneur de sperme! »
— André
André ne voulait pas d'enfant lui non plus. Cela
n'a pas empêché son ex-amie d'avoir une fille,
qui a maintenant 7 ans. Malgré une relation difficile
avec la mère, André adore sa fille et remplit
toutes ses obligations de père.
« Le
Code civil du Québec nous indique qu'aussitôt
que la filiation est établie à l'égard
d'un papa, d'une maman, il y a tout de suite une obligation
alimentaire. [...] Ce n'est pas le nombre de relations sexuelles
qui va atténuer ou augmenter la responsabilité,
elle est la même. »
— Me Michel Tétrault, avocat et procureur, Centre
communautaire de l'Estrie
Les tests d'ADN
Aujourd'hui,
les tests d'ADN ont tout changé. Et dans les causes
de filiation, les tests de paternité sont devenus incontournables.
« Avec l'ADN, les analyses sont d'une précision
pratiquement absolue. On peut dire qu'on a atteint une certitude
biologique. »
— Dr Lambert Busque,
directeur médical, PRO-ADN Diagnostic
L'ADN sert aussi à identifier des maladies
génétiques chez les enfants. Les conseillers
en génétique comme Lola Cartier savent que ces
tests révèlent parfois des faits étonnants.
« Les
études nous montrent que ces tests dévoilent
10 % de non-paternité. » —
Dre Lola Cartier, conseillère en génétique, Hôpital de Montréal
pour enfants
Ce pourcentage doit être nuancé selon le pays
d'origine, l'âge ou la durée du couple.
L'histoire de John
John
est Américain. Sa vie a basculé quand il a appris
toute la vérité : trois de « ses »
quatre enfants n'étaient pas les siens. « Je
me suis senti dépossédé, trahi, très
en colère. Le mariage s'est brisé et les enfants
devront vivre avec ça toute leur vie. »
— John
John a secrètement fait passer un test d'ADN à
ses enfants. « Je me suis informé auprès
d'un laboratoire pour savoir comment récolter des échantillons.
On m'a alors suggéré la gomme à mâcher!
Je leur en ai donc distribué, puis je l'ai ramassée
là où ils la jetaient. Ensuite, on les envoie
tout simplement au laboratoire par la poste! »
Au Canada, on
fait 10 fois moins de tests de paternité
par habitant qu'aux États-Unis. C'est
qu'ici, on doit obligatoirement avoir le consentement
de toutes les personnes concernées. Mais
pour le reste, les démarches sont très
faciles à faire :
Faire
le frottis buccal; le mettre dans l'enveloppe
appropriée; sceller l'enveloppe et retourner
le tout.
Les résultats sont communiqués
entre 3 et 10 jours plus tard, selon la charge
de travail du laboratoire. Le coût du
test? Environ 600 $.
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Légalement, John est toujours le père de ses
enfants. Même chose au Canada, où un homme dans
la même situation reste légalement le père.
La loi veut le bien de l'enfant, et le lien qu'un homme a
développé avec son enfant est alors plus important
que le lien génétique.
« À
partir du moment où le nom de ce monsieur a été
mis comme celui du père sur l'acte de naissance,
et qu'il s'est occupé de l'enfant pour une période
d'environ 18 mois, la paternité, la filiation,
n'est pas contestable. Le Code civil ne recherche pas
la vérité biologique, il recherche la stabilité
des familles. »
— Me Michel Tétrault |
Par la loi, le père est soit le géniteur, soit
le père social, ou encore la mère, en vertu
de la nouvelle législation en vigueur au Québec.
Filiation : de nouvelles règles
au Québec
Le
Québec a adopté des nouvelles règles
de filiation depuis juin 2002. Ainsi, aujourd'hui, deux homosexuels
peuvent être reconnus comme les parents légaux
d'un enfant.
Or, la grande majorité des femmes gaies optent pour
l'insémination. Pourquoi? Parce que si une femme prend
la décision d'avoir un enfant seule, le père
a seulement une année pour faire reconnaître
sa paternité. Par contre, si la femme a un bébé
sans entente préalable, le géniteur peut être
poursuivi pendant 30 ans!
Avec les nouvelles règles du jeu, on a deux poids,
deux mesures. Une femme peut se servir d'un homme simplement
comme géniteur. Un homme ne peut pas faire la même
chose, puisque les mères porteuses sont interdites
au Canada.
Nulle part ailleurs, même dans les sociétés
les plus progressistes comme la France, une loi ne va aussi
loin. Mais cette loi a été adoptée à
toute vitesse et mériterait peut-être un véritable
débat de société.
Journaliste : Claire
Frémont
Réalisatrices : Doris Synnett et Lucie Payeur
Hyperliens
:: Réseau
juridique du Québec - Les tests d'ADN
Pour une réponse aux
tests d'identification
::
Laboratoire PRO-ADN Diagnostic
Laboratoire dont on parle
dans le reportage
::
Helix Biotech
Laboratoire canadien
installé à Montréal
:: DNA
Diagnostics Center
Laboratoire situé
en Ohio (site en français)
:: Assemblée nationale - Texte de la loi 84
Loi instituant l'union civile
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