Metteur en scène,
maître de danse ou maestro, la tradition les rend
seuls maîtres à bord. Le mythe veut qu'ils
aient une poigne de fer pour garder le cap de l'excellence.
Edgar
Fruitier, animateur à la radio et comédien,
est reconnu comme un des plus grands amateurs de musique
classique au Québec. Selon lui, les moments de
grâce en musique sont souvent le fait de maestros
tyranniques : « Il peut y avoir résistance
bien sûr, mais il faut que le chef d'orchestre dise :
si on veut avoir l'unité d'une interprétation,
c'est moi qui décide. »
Alain Lefebvre
est un de nos grands pianistes. Il joue régulièrement
avec les plus grands orchestres symphoniques du monde.
Tout comme Edgar Fruitier, il a une véritable passion
pour la musique. Cependant, ils ne s'entendent pas sur
le reste :
« Le temps des tyrans sera totalement révolu.
Et le "baveux" de nature devrait peut-être
commencer à avoir un peu peur. Je pense que les
choses vont changer. Les choses changent déjà. »
- Alain Lefebvre
Des
durs de durs, il y en a partout. En musique, mais aussi
au cinéma et au théâtre. Si le public
connaît bien le côté théâtral
de Paul Buissonneau, beaucoup de comédiens,
eux, ont remarqué son caractère bouillant.
Ce qu'il avoue. Il lui arrive d'insulter les membres d'une
production :
« Je
devenais furieux, je les insultais, et j'avais raison !
Ils n'ont qu'à fermer leur gueule, ils n'ont qu'à
travailler comme moi je le fais! »
- Paul Buissonneau,
comédien et metteur en scène
Danielle Panneton
est comédienne et metteure en scène depuis
presque 30 ans. Aujourd'hui, elle décide de
parler au nom des comédiens condamnés à
se taire devant la tyrannie de certains metteurs en scène :
« Il
y a souvent une sorte d'aura culturelle qu'on installe
autour de certaines personnes. Ce sont des maîtres,
on ne peut pas les contredire. Ils ont le pouvoir absolu. »
- Danielle Panneton,
comédienne et metteure en scène
Ce débat sur le chemin
à prendre pour atteindre l'excellence n'est
pas propre aux arts. On l'entend aujourd'hui partout :
même chez nos plus grands athlètes,
habitués à marcher au pas sous les
ordres de leur entraîneur.
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Le
nom de Guy Lafleur est synonyme d'excellence au
Québec. Il a fracassé tous les records dans
les rangs juniors. Il était déjà
une grande vedette lorsqu'il a été repêché
au premier rang par le Canadien de Montréal. À
l'époque, tous les joueurs devaient se soumettre
à la discipline quasi militaire imposée
par la direction du club, vedette ou pas. C'était
d'ailleurs l'époque de Scotty Bowman : un
instructeur considéré comme le plus dur
qui soit.
« Il
piquait les joueurs devant tout le monde, il essayait
de les humilier. [...] Il n'y a pas un joueur qui l'aimait ! »
- Guy Lafleur
Aujourd'hui, Scotty Bowman se défend à peine
d'avoir été trop dur envers ses joueurs.
Pour lui, il n'était pas là pour se faire
des amis.
Ce débat sur les tyrans déborde largement
les milieux d'élite tels que le sport et les arts.
Qu'on soit au travail, à l'école ou même
dans l'armée, les tyrans n'ont plus la cote. Quant
à l'excellence, on le voit, il n'y a pas de recettes
miracle. S'il est vrai que cela prend des leaders, une
chose est certaine : le résultat reposera
toujours sur la motivation libre et volontaire d'individus
rêvant d'atteindre les plus hauts sommets.
Recherchiste : Marie-Claude
Pednault
Journaliste : Alain Gravel
Réalisatrice : Anne Sérode