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« Ça fait 34 ans que je les connais
et qu'on développe des
relations mutuellement. C'est devenu plus que papa, maman
et le garçon. On est devenus amis à travers
tout ça. »
- Claude, 34 ans
Ils ont 28, 30, 34 et 41
ans et vivent toujours chez leurs parents. Et ils sont beaucoup
plus nombreux que vous ne l'imaginez : près de
700 000 Canadiens âgés entre 25 et
34 ans habitent toujours chez leurs parents, soit un sur trois.
« J'ai quand même mon intimité,
ils ne descendent pratiquement jamais en bas. »
- Michelle, 28 ans
« La première fois que tu te couches dans
ta chambre tu te dis Mon Dieu! (rire), il y a quelques
années, j'étais ici et j'y reviens. J'ai
changé la décoration, ça a beaucoup aidé! »
- Lorraine, 41 ans
« J'ai grandi ici. Ça fait 30 ans que
je suis ici. Je ne veux pas me départir de cette maison-là,
à moins que je commence ma propre vie. »
- Danny, 30 ans
Enjeux vous raconte d'abord
l'histoire de Claude, qui a 34 ans. Au contraire de ce que
plusieurs pourraient croire, ses parents ne souhaitent pas
du tout son départ : « Ça
ne nous dérange pas, ça garde la maison jeune! »
nous dit son père.
« Mon mari travaille
de soir... Ça coupe l'ennui qu'il pourrait y avoir,
la routine trop régulière. Claude coupe tout
ça : il nous parle, il nous raconte toutes ses
choses à lui », ajoute sa mère.
« Me
ramasser dans un 3 1/2 et parler aux quatre murs?
Pas tout de suite! »
Claude a un train de vie tout
à fait normal. En fait, il est similaire à celui
des hommes de son âge : il a un travail, un réseau
social et il fréquente beaucoup les salles de cinéma.
La différence : il n'a jamais quitté la
maison familiale. Pourquoi? Claude mise sur sa carrière :
il veut devenir comédien. Pour ses parents, il est
tout à fait normal de lui donner un coup de main.
« Ça lui coûte 45 $ de l'heure
pour ses cours en cinéma et il fait un salaire de 9 $
de l'heure. Donc, c'est sûr que de ce côté-là,
ça l'aide. »
- La mère de
Claude
Ses parents font tout pour
lui : nourri, logé (50 $ par semaine), lavages
et lunchs compris.
Un phénomène
nouveau ?
Des
enquêtes longitudinales révèlent
que les gens nés autour des années
1930 quittaient la maison plus tardivement, comme
les jeunes d'aujourd'hui, en raison des conditions
socioéconomiques difficiles.
Bref, c'est la génération
des babyboomers qui a fait l'exception. Le phénomène
actuel pourrait donc n'être qu'un juste retour
des choses.
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Selon
Michel Claes, enseignant au Département de psychologie
de l'Université de Montréal, l'adulte doit
absolument, un jour ou l'autre, faire « le grand
saut ». « Quitter ses parents, c'est
une étape importante dans cet accès à
l'âge adulte. Se prendre en charge, prendre sa vie en
main, devenir autonome, c'est quand même un passage
important et fondamental. C'est un temps où il faut
s'insérer dans la vie sociale, se trouver un job, se
positionner soi-même. (
) On risque de trouver
des personnes qui sont plus dépendantes, émotionnellement,
affectivement, et qui auront du mal à faire face à
des difficultés quotidiennes. »
Un phénomène tabou
Ce qui est sûr, c'est que les adultes qui demeurent
chez papa et maman sont victimes de préjugés.
Le phénomène est extrêmement tabou,
la très grande majorité refusant d'en
parler publiquement.
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Enjeux
vous raconte aussi l'histoire de Daniel, qui est Italien.
Dans sa culture, habiter longtemps chez ses parents est loin
d'être tabou : c'est normal. « Souvent,
quand ma mère me présente, elle dit : ça,
c'est mon bébé! Moi, j'aime ça! Parce
qu'on a toujours besoin d'être rassuré, peu importe
l'âge qu'on a. Pour moi, c'est ma sécurité
de savoir qu'elle me considère encore comme son bébé. »
Le phénomène boomerang
Quant à Lorraine, ses parents, qui habitent une grande
maison, lui ont offert de revenir habiter avec eux, il y a
deux ans. Âgée de 39 ans, elle vivait alors une
séparation douloureuse. Michelle Fortier, 28 ans, a
reçu la même offre. Elle est de retour à
la maison familiale après trois ans d'absence. Comme
elle était sans emploi, sa mère et sa tante
ont accepté de l'héberger le temps qu'elle se
refasse une situation.
Le retour aux sources, que les sociologues appellent le
phénomène boomerang, est de plus en
plus présent. L'an dernier au Québec,
plus de 140 000 adultes âgés entre
20 et 29 ans sont retournés vivre chez leurs
parents, selon Statistiques Canada.
Plus la maison est grande, plus
les parents sont susceptibles de voir revenir leur
progéniture.
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La précarité des
emplois, l'augmentation des loyers et les séparations
expliquent en grande partie pourquoi les adultes retournent
de plus en plus vivre chez leurs parents.
Journaliste
: Nancy Desjardins
Réalisateur : Jean-Louis Boudou
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