D'après
un sondage récent, 60 % des gens qui habitent
en ville souhaitent un jour aller vivre à la campagne.
La plupart ne réaliseront pas leur rêve, mais
quelques-uns feront le pas et quitteront les grands centres
pour le milieu rural. On les appelle les néoruraux.
Martha
Choquette-Lévesque est native des Cantons-de-l'Est,
mais pendant 28 ans elle a habité Vancouver,
Toronto, Montréal et Québec. Aujourd'hui,
elle est revenue dans sa région natale et habite
une maison de ferme près de Gould, un petit village
d'à peine 35 habitants.
Il y a quelques années,
elle n'aurait jamais pu faire ce choix et poursuivre sa
carrière dans la publicité. Mais aujourd'hui,
si on peut transiger à partir de Montréal
avec Vancouver et Tokyo, on peut tout aussi bien le faire
du fond d'un rang. « Tout ça a débuté
en 1995, quand j'ai eu l'opportunité de travailler
pour Rosenbluth International, une entreprise en gestion
des voyages qui m'a engagée pour faire la vente au
Canada. Je travaillais de ma maison à Saint-Lambert
et je couvrais le Canada entier. Ça m'a convaincue
qu'on peut travailler de la maison [de façon professionnelle] »,
explique-t-elle.
Urbain
Desbois est auteur-compositeur. Il a lui aussi
déménagé près du village de
Gould il y a quatre ans. Trouve-t-il la vie à la
campagne ennuyeuse? « Oui, souvent, mais
ça ne me dérange pas. [
] En fait, la
chose que j'ai appris ici c'est que c'est normal de s'ennuyer
dans la vie, il faut juste prendre ça avec un grain
de sel puis attendre que ça passe »,
répond-il.
Comme pour Martha Choquette, Urbain
Desbois peut aussi très bien travailler de sa maison
à la campagne et ne revenir en ville que pour présenter
son produit final. « Moi, je fais des chansons,
je les compose ici, je travaille mes affaires ici. Quand
c'est prêt, je vais faire les shows et quand
c'est fini, je reviens. »
« On
a remarqué ces quatre, cinq dernières années
que les gens qui venaient s'installer étaient des
jeunes familles avec des enfants qui débutaient le
primaire, alors c'est intéressant, c'est essentiel.
Tous les villages du Québec doivent absolument garder
leur école, c'est la base absolument essentielle,
comme tous les autres services à proximité
: avoir son épicerie, sa station-service [
],
sa caisse populaire, son bureau municipal et un bureau de
poste », affirme Renée Wilsey,
qui s'est installée dans le village de Saint-Camille
depuis une dizaine d'années. Selon elle, la survie
des villages dépend du nombre d'enfants et de la
cohésion sociale. Elle est d'ailleurs l'organisatrice
communautaire du village et prépare des fêtes,
des spectacles, des expositions, des repas : bref,
tout ce qui est nécessaire pour maintenir une vie
culturelle et encourager les citoyens à rester.
Bernard
Vachon, géographe et chercheur, s'intéresse
à ce phénomène de la néoruralité.
Selon lui, si « la ville comme on l'a connue
a été une parenthèse, c'est parce qu'on
avait besoin de la concentration, mais à partir du
moment où on aura les moyens de sortir de la ville,
on va le faire ». Il rappelle que ce phénomène
a pris naissance au cours des années 1960, mais qu'il
s'agissait à l'époque d'un mouvement de retour
à la terre, alors qu'aujourd'hui, la majorité
des néoruraux exercent d'autres activités.
C'est
le cas de Richard et Nathalie, déménagés
à Notre-Dame-des-Bois, près du Lac Mégantic,
à trois heures de Montréal. À Montréal,
Richard était arpenteur et travaillait aussi dans
la construction. Nathalie était infirmière
à l'hôpital de Montréal. Arrivés
à la campagne, Richard et Nathalie ont choisi de
garder leurs occupations professionnelles. « J'ai
décidé de partir à mon compte. J'offre
des services d'arpentage à tous les contracteurs
de la région », annonce Richard. Nathalie,
quant à elle, compte travailler à l'hôpital
de Lac-Mégantic.
Ce qu'on lit dans les journaux est réel : les régions
se dépeuplent. Ce qu'on dit moins, c'est que de plus
en plus de gens font le chemin inverse. Ils quittent la
ville pour la campagne. Pour l'instant ils ne sont pas assez
pour remplacer tous ceux qui sont partis, mais ailleurs
le phénomène est plus marqué. En Europe
et aux États-Unis, des villages moribonds ont carrément
été sauvés par l'arrivée des
gens de la ville. Au Québec, actuellement, on s'installe
surtout près d'une ville importante, mais Bernard
Vachon croit que ce n'est qu'un début.
« Dans 10, 15 ou
20 ans, le phénomène pourra gagner d'autres
territoires pour d'autres raisons. Pensons uniquement à
la qualité de l'air et la qualité de l'eau.
Est-ce que vis-à-vis ces deux seuls critères,
la Gaspésie, dans 15, 20 ans, ne sera pas une
espèce de paradis qui attirera de plus en plus de
gens? », lance le géographe.
Journaliste : Errol
Duchaine
Réalisateur : Jean-Louis Boudou
Hyperliens
:: Ministère
des Régions du Québec
On retrouve sur ce
site gouvernemental des liens vers différents programmes
pour encourager la vie hors des centres urbains.