La
stérilisation à l'ozone
Saskatoon,
8 août 2002. Santé Canada annonce qu'un
premier Canadien est mort d'avoir attrapé la
maladie de la vache folle. En fait, une variante de
la maladie de Creutzfeldt-Jakob, comme disent les médecins.
Quelques mois avant sa mort, la victime avait subi
un examen endoscopique à l'Hôpital
Saint-Paul. Dans cet hôpital, 71 patients
risquent maintenant que la même maladie détruise
leur cerveau. Même après de nombreuses
stérilisations de l'endoscope...
En Angleterre, où
l'épidémie de la vache folle a débuté,
les hôpitaux ont été balayés
par un vent de panique quand la population a su
que la maladie mortelle est transmise par un prion
: une protéine qui résiste à
toutes les techniques de stérilisation.
« Les nouveaux instruments
ont évolué plus vite que la
capacité de les décontaminer
ou de les stériliser. C'est pour cela
qu'il faut trouver des alternatives. »
- Dr Richard Marchand,
microbiologiste, Institut de Cardiologie de
Montréal
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Les prions sont indétectables
à la surface des instruments chirurgicaux.
Ils peuvent se transmettre lors d'une simple ablation
des amygdales. Le gouvernement du Royaume-Uni a
dû exiger que toutes les chirurgies à
risque se fassent avec des instruments jetables.
Ce programme lui a coûté un demi-milliard
de dollars depuis trois ans.
Des instruments jetables
Et pourtant, le prion est un problème plutôt
secondaire dans le panorama mondial de la stérilisation.
Partout, les hôpitaux dépensent des
fortunes pour des instruments qu'ils sont incapables
de stériliser. En effet, la nouvelle chirurgie
est devenue micro-invasive : elle utilise des outils
microscopiques qu'on manipule à distance.
Mais
la stérilisation de ces coûteux instruments
est un vrai casse-tête. C'est pourquoi on
utilise des cathéters jetables, à
$ 100 l'unité, des rotablators jetables,
qui valent plus de $ 1 000 chacun, voire des curs
artificiels jetables à $ 35 000 chacun. Mais
qu'est-ce qui empêche les hôpitaux de
stériliser ces instruments après une
opération ?
Cela tient en partie
aux matériaux synthétiques qui fondraient
si on les stérilisait à chaud, avec
de la vapeur. En principe, on pourrait aussi les
stériliser à froid, avec de l'oxyde
d'éthylène. Mais il faudrait au moins
pouvoir les démonter pour les récurer,
ce qui est impossible avec les instruments très
fins qu'on enfile dans les voies naturelles.
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Les instruments
jetables sont toujours stériles...
mais ils sont aussi très coûteux.
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De sales endoscopes
C'est le problème des endoscopes
qu'on
réutilise pourtant de jour en jour.
Selon l'Association for
the Advancement of Medical Instrumentation,
une organisation américaine qui établit
des normes de stérilisation, 25% des endoscopes
seraient encore contaminés ou contiendraient
encore des microbes vivants, même après
le processus de stérilisation.
Denver, 1995. Une crise
met en lumière le plus grand obstacle à
une stérilisation vraiment efficace. En un
mois, douze patients se retrouvent en état
de choc toxique, toujours à la suite de chirurgies
cardiaques « non invasives »
par cathéter. Conséquence : deux morts.
Conclusion de l'enquête : stérilisation
incomplète. On a bien tué les microbes
mais on n'a pas détruit les endotoxines.
Quand un microbe est tué,
ses membranes se déchirent. L'intérieur,
qui contient des endotoxines très dangereuses,
se répand. Cela laisse une sorte de pellicule
empoisonnée sur l'objet qu'on voulait stériliser.
Lorsqu'on insère cet objet dans un vaisseau
sanguin, la pellicule se dissout. Les toxines se
libèrent d'un seul coup. C'est le choc toxique !
Or,
les hôpitaux sont aussi démunis face
aux endotoxines qu'ils le sont face aux prions.
Impossible de les détruire !
Une
nouvelle technique
Il
existe une solution : un tout nouveau stérilisateur
à l'ozone, conçu à Québec,
chez TSO3. Il y a longtemps qu'on connaît
la stérilisation à l'ozone mais c'est
la première fois qu'on l'applique à
des instruments chirurgicaux.
« Le
défi que nous avions à relever était
de créer beaucoup de vapeur d'eau au point de
saturation, sans créer de bulles d'eau parce
que les bulles d'eau deviennent une barrière
supplémentaire à la stérilisation
de micro-organismes », explique Jocelyn
Vézina, président de TSO3.
Jocelyn
Vézina attribue cette percée
à l'expertise informatique de son
équipe.
Car l'ordinateur contrôle toute les
facettes de la stérilisation : la
pression, avec une pompe à vide,
l'humidité, grâce à
un générateur de vapeur froide,
et la quantité d'ozone qui sort du
générateur.
Comme
matière première : l'oxygène
qu'on trouve dans tous les hôpitaux.
Lorsque les atomes d'oxygène sont
frappés d'une décharge électrique,
ils forment des molécules à
trois atomes : les molécules d'ozone.
Mais l'ozone est instable. Très vite,
il libère un atome isolé qui
agrippe tout ce qu'il rencontre. C'est cet
atome solitaire qui stérilise.
Le
procédé de TSO3
a été testé avec les
spores microbiens les plus résistants.
Et avec toutes sortes de matériaux
: plastique, tissus, caoutchouc, acier
Ces tests ont été répétés
à l'Institut de Cardiologie et les
résultats sont extraordinaires :
même les endotoxines sont détruites.
« Parmi
les procédés oxydatifs, c'est
le plus puissant de ceux avec lesquels on
a travaillé, explique le docteur
Richard Marchand. Plus la puissance oxydative
est forte, plus le procédé
est puissant pour éliminer la matière
organique, c'est à dire les bactéries,
les virus, les parasites, et même
les produits chimiques qui peuvent être
oxydés. »
Des essais
sur les prions
Avec
une arme si efficace, pourquoi ne pas s'attaquer
aussi aux prions ? Dans un premier temps,
on a placé dans le stérilisateur
des prions trouvés dans des champignons.
Le docteur Richard Marchand présente
fièrement les résultats :
« Complètement détruits
à un point tel que ça allait
au delà des limites mesurables par
nos appareils. Maintenant, on a repris le
tout avec des prions de hamster et encore
une fois, on a été aux limites
de détectabilité des méthodes
de mesure. »
Il faudra encore
des analyses beaucoup plus fines avant de
conclure que tous les prions sont vraiment
détruits. Mais déjà,
Santé Canada a diffusé dans
le monde entier ces résultats inouïs.
De plus, ce nouveau
stérilisateur a maintenant l'approbation
officielle de Santé Canada. Quatre
autres hôpitaux québécois
en ont fait l'acquisition. Une technologie
qui a l'avenir devant elle.
Journaliste : Gilles Provost
Réalisatrice : Marièle
Choquette
Adaptation pour Internet :
Isabelle Montpetit
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« On est
en manque de nouvelles technologies de nettoyage
ou de décontamination. »
- Dr Richard Marchand, microbiologiste,
Institut de cardiologie de Montréal
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Même passés
à l'autoclave, le quart des endoscopes
ne sont pas stériles !
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Qu'est-ce
qu'un prion ?
Les prions ne ressemblent
à aucun autre agent infectieux connu. Ce
sont de simples protéines, sans aucun bagage
génétique. Les personnes saines,
comme la majorité dentre nous, fabriquent
une version normale de cette protéine.
Mais dans certaines circonstances, une version
anormale de la protéine se retrouve dans
lorganisme, par exemple lorsquon mange
de la viande de boeuf contaminée. On croit
quun simple contact avec la forme anormale
peut modifier une protéine normale, laquelle
pourra à son tour transformer ses voisines.
Le médecin américain
Stanley Prusiner a reçu le prix Nobel de
médecine en 1997 pour son hypothèse
du prion comme agent infectieux des encéphalopathies
spongiformes, des maladies comme celles de la
vache folle, de Creutzfeld-Jakob, ou encore la
tremblante du mouton.
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Pour stériliser
à l'ozone, la matière première,
c'est tout simplement de l'oxygène, comme
on en trouve dans tous les hôpitaux.
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