Histoire de l'anatomie humaine
Des cryptes sombres à l'homme transparent en 3D

Le 17 octobre 1999
Transcription

L'homme visible : voilà le titre d'un projet exceptionnel. En 1993, un condamné à mort donne son corps à la science. On congèle le corps en question et on le tranche en 1800 fines lamelles faisant un millimètre d'épaisseur. Entre chaque lamelle, on photographie le corps. Résultat : un homme virtuel en 3-D qui permet de voir l'anatomie humaine comme on ne l'a jamais fait auparavant.

L'homme virtuel est, en fait, la dernière démarche entreprise par les scientifiques pour faire avancer notre compréhension du corps humain. Cette démarche a commencé à se faire il y a des siècles, en cachette, parce qu'à l'époque, la dissection était interdite.

En compagnie de Charles, nous accomplirons donc une visite historique dans le corps humain, des premières planches grossières du XVe siècle, à l'homme virtuel de cette fin de millénaire.

Le corps humain. Aujourd'hui, il prend la forme d'images de synthèse. En trois dimensions. Et en couleur.

Des images étonnantes, presque dérangeantes, maintenant disponibles sur Internet. C'est l'homme transparent.

Voilà une méthode révolutionnaire pour qui s'intéresse à l'anatomie. C'est tout le corps qui s'offre au regard, ou plus simplement, une seule partie du corps à la fois. Comme cette articulation du genou, à laquelle s'attachent les tendons et les muscles, et que la peau vient recouvrir.

 

Mais bien avant de parvenir à une telle compréhension de l'anatomie, on s'extasiait déjà sur les prouesses de cette mystérieuse mécanique.

Puissance et beauté, grâce et vigueur, fragilité et endurance: de toutes les formes d'art, la danse est celle qui illustre le mieux l'extraordinaire complexité du corps humain.

 

Le désir de démonter et d'analyser cette mécanique révèle une histoire fascinante qui s'est construite au fil des siècles, petit à petit, malgré les difficultés, malgré les interdits.

Au Moyen Âge, dans les sociétés occidentales, il y avait peu d'intérêt pour le corps humain. C'était le fief exclusif des premiers médecins, souvent barbiers, spécialistes de la saignée. Ce sont eux qui ont ouvert le chemin du savoir dans le domaine.

 

Ils savaient bien qu'il y avait des organes, et que le corps était constitué de liquides divers, appelés communément humeurs. Sang, sueur, salive, ces humeurs variaient en quantité et en qualité, selon l'état de santé. D'ailleurs, voilà d'où vient l'expression: être de bonne ou de mauvaise humeur.

Grâce aux animaux avec lesquels ils vivaient en relation très étroite, les premiers médecins savaient aussi que, tout comme les bêtes, les humains étaient constitués d'os, de nerfs et de tendons.

Mais dans l'ensemble, les connaissances anatomiques étaient très limitées. Voici comment on se représentait le corps humain à la fin du 15ième siècle. D'une façon naïve, presque erronée. Bientôt, les choses allaient changer.

 

Dès le 17ième siècle, les connaissances se raffinent. Comme le prouve cette peinture de Rembrandt. Léonard de Vinci lui-même s'est penché sur le sujet comme le montre ces croquis dessinés vers 1645.

En réalité, ils étaient de plus en plus nombreux les esprits curieux qui voulaient en savoir davantage. Le problème, c'est qu'à l'époque, il était fort mal vu d'ouvrir un corps humain, car c'eût été profaner le réceptacle de l'âme.

C'était une question d'attitude.

 

Ceux qui étaient passionnés par le corps humain devaient parfois prendre des risques.

A la tombée de la nuit, ils envoyaient leurs apprentis à la morgue. Si celle-ci était vide, ils allaient marauder du côté des fosses communes pour dérober l'un des corps que l'on venait tout juste d'y déposer.

C'est dans des souterrains humides et faiblement éclairés, semblables à celui-ci, que les premiers anatomistes se faisaient la main.

 

Grâce à ce travail ingrat, les premières planches anatomiques voient le jour. Enfin, la médecine quitte le domaine des pratiques secrètes pour acquérir droit de cité dans les écoles et dans les universités.

Depuis1850, les planches utilisent la couleur. Elles sont de plus en plus précises, comme autant de pages spécialisées sur chaque organe et chaque composante du corps humain.

 

Aujourd'hui, les études anatomiques font partie de la vie de tous les jours pour les futurs médecins et surtout pour les futurs chirurgiens.

Toutes les grandes facultés de médecine apportent un soin jaloux à leur classe de dissection. Avant d'être inhumés honorablement, les corps livrent d'abord leurs secrets, sous l'oeil attentif, et respectueux, des étudiants et des professeurs.

C'est une recherche continuelle. Le corps humain ne livre pas ses trésors facilement. Mais grâce à l'informatique moderne, on a fait un pas de géant.

 

L'homme transparent. En 1993, un condamné à mort donne son corps à la science.

On a d'abord congelé le corps en question, puis on a procédé à 1800 coupes tout juste épaisses de 1 millimètre. Entre chaque coupe, une caméra numérique et des logiciels de synthèse photographient l'ensemble.

Une fois toutes les photos en mémoire, l'énorme centre d'informatique spécialisé dans les images de synthèse de l'université du Colorado, a traité cette montagne de données de façon à créer un homme transparent en couleurs et en trois dimensions. C'est un véritable tour de force.

 

Non seulement on peut aller de l'extérieur de ce corps vers l'intérieur, comme si on enlevait toutes ses pelures à un oignon, mais on peut aussi se situer n'importe où à l'intérieur même du corps.

Cet outil est à ce point précis qu'il peut nous aider à déterminer l'emplacement exact d'une tumeur au cerveau par exemple, et aller l'étudier sur place.

Il y a mieux encore. On peut faire apparaître l'articulation du genou, par exemple, la recouvrir de ses muscles, de son réseau veineux, et enfin de la peau. On peut même utiliser un scalpel de synthèse pour se livrer à des opérations diverses, des opérations que l'on peut répéter autant de fois qu'on le désire, sans danger pour le patient.

Mais l'homme transparent n'est pas encore un instrument de travail complet pour les futurs chirurgiens, car il lui manque une dimension essentielle: la matière. il n'est pas fait de chair et d'os.

 

Parce que la chair est absente, la sensation du toucher est inexistante.

Pour créer cette sensation tactile, les chercheurs ont réquisitionné les techniques les plus novatrices de la réalité virtuelle: comme ce gant. Il est fabriqué de telle façon qu'il donne à l'usager l'impression de fermer la main sur une balle, par exemple, ou encore de faire couler l'eau du robinet.

Il ne reste plus maintenant qu'à faire la même chose avec le scalpel. Ainsi la médecine du futur ajoutera à son arsenal un outil fabuleux pour pousser encore plus loin la compréhension du corps humain.

 

Pour en savoir plus:

Visible Human Male
L'homme transparent. Du Science Health Center de l'Université du Colorado.
Images, reconstructions et animations, fureteurs, produits etc... En anglais.

Visible Human Female
La femme transparente. Du Science Health Center de l'Université du Colorado.
Images, reconstructions et animations, fureteurs, produits etc... En anglais.

The Visible Human Project
Site officiel du projet The Visible Human. En anglais.

L'Homme transparent
Version française du site Visible Human. Moins complète. En anglais.

The Visible Human Main Page
Produits reliés, CDRom, etc. Possibilité de commander en ligne.

 

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