La physique du boomerang

Le 26 septembre 1999
Transcription

Comment un simple morceau de bois, lancé dans les airs, peut-il revenir à son point de départ ? Le boomerang a toujours fasciné. Mais il effectue aujourd'hui - si on peut dire - un véritable retour en force. Ici même, à Montréal, des amateurs se rencontrent régulièrement pour pratiquer un sport d'adresse qui est aussi une passion.

 

Les aborigènes australiens l'appelaient le « bâton qui vole ».

On ne sait ni quand ni comment cet objet est né. Selon une légende, un vieux chef avait décidé de jeter son baton de marche, tout rongé et courbé, mais le baton revint vers lui. Agacé, le chef le relança et le baton revint une fois de plus.

Par contre, ce qui est certain, c'est que les premiers boomerangs étaient en bois, tout comme celui-ci, d'origine australienne.

 

En Australie, les indigènes les utilisaient pour des jeux d'adresse et pour la chasse. Contrairement à ce qu'on peut penser, toutefois, ce n'était pas pour tuer les animaux, mais plutôt pour les effrayer et les rabattre vers les chasseurs.

Les Australiens n'ont toutefois pas l'exclusivité du boomerang. Des fouilles archéologiques ont montré qu'il était connu de différentes cultures partout dans le monde.

En Egypte, par exemple, on a retrouvé des reproduction de bâtons à lancer dans la tombe de Toutankhamon.

Plus près de nous, certains Amérindiens, notamment les Hopis de l'Arizona, connaissaient aussi le boomerang.

 

Les boomerangs d'aujourd'hui sont bien différents de ceux du passé.

Le matériau le plus utilisé est encore le bois - du contreplaqué très léger. Les tailles sont variables, mais la tendance depuis quelques années est au petit boomerang, de 30 cm maximum d'envergure.

Toutefois, on en fabrique aussi en matériaux composites modernes, comme le carbone ou le polypropylène.

 

Très longtemps, le vol du boomerang est resté un mystère.

Au début du siècle, on a commencé à élaborer quelques explications. Mais ce n'est que récemment, en 1975, qu'un chercheur néerlandais, Félix Hess, a réussi à répondre à toutes les questions scientifiques. Il a littéralement mis en équations le vol du boomerang.

En simplifiant, l'explication tient à deux grands phénomènes physiques: la portance et l'effet gyroscopique.

 

La portance est ce qui permet à un avion ou à une aile d'oiseau de se maintenir en vol. Les pales du boomerang sont profilées comme les ailes d'un avion, de forme bombée au dessus, et plates en dessous.

A cause de cette forme, l'air s'écoule plus rapidement sur le dessus de l'aile qu'en dessous.

Avec la vitesse, la pression sur la partie bombée diminue, tandis que celle sur la partie plate augmente.

Cette différence de pression crée une force qui aspire l'aile vers le haut. C'est la portance.

 

Lorsqu'on lance un boomerang dans les airs, il tourne rapidement sur lui-même, les deux pales battant les airs. Il est alors soumis à d'autres forces, la plus importante étant ce qu'on appelle la précession gyroscopique.

 

Tous les gyroscopes, comme cette toupie, possèdent des propriétés très particulières.

D'abord, lorsque la toupie tourne, son axe de rotation reste vertical et fixe.

Maintenant, si on applique une force pour la faire basculer sur le coté, la toupie a l'étrange faculté de ne pas tomber. Son axe de rotation varie constamment et décrit la surface d'un cone imaginaire, dans un mouvement que l'on appelle précession gyroscopique.

 

La précession s'applique à un boomerang en mouvement. La portance étant inégale sur les deux pales, l'axe de rotation du boomerang aura tendance à se modifier. Au lieu d'aller tout droit, un boomerang normal - lancé par un droitier- se déplacera légérement sur sa gauche à chaque rotation.

Le résultat est que le boomerang décrit une longue courbe dans les airs, jusqu'à ce que sa vitesse de propulsion soit nulle et qu'il arrive en chute douce, près de son point de départ.

 

Ces principes scientifiques aident à comprendre la dynamique du vol, mais ils ne remplacent pas l'habilité du lanceur.

Celui-ci doit se placer face au vent et diriger son tir en formant un axe de 45 degrés par rapport à l'axe du vent.

Moyennant quoi, le boomerang prendra une belle trajectoire revenant à son point de départ. Mais ce n'est pas garanti... Le lanceur a souvent fort à faire pour attraper son boomerang...

 

Aujourd'hui, le boomerang est en plein renouveau et on voit apparaître beaucoup de nouvelles formes.

Il s'agit de choisir la forme appropriée au défi. Par exemple, lancer le plus loin possible - actuellement, le record canadien est de 73 mètres. Ou encore, faire le plus grand nombre possible de lancers-rattrapés possibles en un minimum de temps.

Mais on n'est pas obligé d'être champion toutes catégories pour lancer un boomerang. Tous les modèles sont bienvenus, et il n'y a pas non plus de limite d'âge...

 

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