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L’inarrêtable Geneviève Asselin-Demers

Une coureuse, munie de bâton, dans un sentier.

Geneviève Asselin-Demers termine 8e au MIUT, sur l'île de Madère.

Photo : Instagram/genevievead

Pour franchir le fil d’arrivée du MIUT, une course en sentier de 115 km sur l’île de Madère, au Portugal, Geneviève Asselin-Demers a dû puiser au plus profond d’elle-même. Elle a souffert. Elle a pensé abandonner. Mais la Québécoise a tenu le coup pour terminer au 8e rang dimanche dernier.

La Québécoise a été invitée à prendre part à cette compétition à la suite de sa victoire au 100 km du Québec Mega Trail en 2023. Cette participation devait servir de préparation en prévision de l'Ultra-Trail du Mont-Blanc (UTMB) en août prochain.

Plus tôt cette année, Geneviève Asselin-Demers avait fini 6e à la Back Canyon Ultras en Arizona. À la fin de 2023, elle a remporté le Puerto Vallarta Mexico, un résultat qui lui avait donné sa place à l'UTMB.

La coureuse en est seulement à sa deuxième saison, mais elle montre déjà une impressionnante feuille de route. Celle qui a notamment gagné le marathon de Montréal, en 2015, a dominé le circuit québécois et canadien au cours de la dernière année. Elle demeure cependant particulièrement nouvelle sur la scène internationale.

Malgré une excellente préparation, elle n’avait pas anticipé que les conditions météorologiques seraient si désastreuses pendant la course, surtout que lors des deux jours passés sur l’île de Madère avant son départ, le beau temps et la chaleur étaient au rendez-vous. Elle a vécu l’enfer pendant les 18 h 42 min de cette traversée qui comporte un dénivelé positif de 7100 mètres.

C’était difficile. Ce n'était pas juste un froid de -40 degrés Celsius. Sur les 18 heures de course, il a plu pendant environ 16 heures. Dans le groupe où j’étais, nous étions transis par le froid. Même si je suis Québécoise, j’avais mal aux os. J’étais transpercée par le froid, a-t-elle expliqué quelques heures après son retour au Québec.

J’ai passé 18 heures sur les 18 heures 40 minutes à me dire : "Pourquoi je m’inflige cette douleur?" Peu importe la course que j’ai faite l’an dernier, j’avais un regain d’énergie, un moment où j’appréciais le paysage. Là, je n’appréciais plus. Le froid te gruge tellement toutes tes réserves d’énergie et tes glucides que tu as des idées négatives. Ton énergie est grugée par ton hypothermie.

Contrairement à ses adversaires, l'athlète a voyagé seule. Elle devait donc trimbaler tout le nécessaire en courant, ne pouvant pas se fier sur un assistant aux stations de ravitaillement.

Je voyais les gens qui abandonnaient. Il y avait énormément de chevilles foulées parce qu’on courait à la lampe frontale et on n’était même pas capable de voir nos pieds, a-t-elle raconté.

Ça m’a permis de réaliser qu’une course aussi longue, je ne referai pas ça sans assistance. C’est trop important. Ça change la donne de savoir qu’un ami t’attend avec du linge chaud, avec quelque chose de réconfortant. Juste de ne pas être seule, ça te donne un but à atteindre, ajoute-t-elle.

La réalité de Geneviève Asselin-Demers est bien différente de celles des Européennes. Ces dernières sont rémunérées, alors que la Québécoise doit se contenter de commanditaires qui lui fournissent nourriture et vêtements. Bien que cela lui donne un coup de main, elle doit quand même débourser pour ses déplacements.

Il est donc impossible pour elle d’arrêter son emploi d’ingénieure qu’elle occupe toujours à temps plein. Mais de toute façon, quitter complètement sa carrière ne serait pas une option pour la mère de jumelles.

Les gens contre qui je compétitionnais, c’est leur job de performer. Le matin, ils s’entraînent et après ils vont faire une petite sieste. Moi, je m'entraîne et ensuite je m’occupe de deux enfants et je vais travailler. Moi, ma 8e place, je la trouve encore plus belle. Je n’aimerais pas ça que ce soit mon emploi parce que je veux que ça demeure ma passion.

Une citation de L'athlète Geneviève Asselin-Demers

Comment expliquer qu’une Québécoise qui ne peut s’entraîner qu'au mont Royal ou, à la limite, au mont Sainte-Anne, qui est ingénieure et mère de deux jeunes filles, arrive ainsi à se démarquer parmi l’élite mondiale? Selon elle, c’est la force mentale et la résilience qui font toute la différence.

Les aptitudes, tu les as ou tu ne les as pas. Ma force, ce n’est pas la montée, c’est la descente. J’ai une facilité à lire le sentier, je n’ai pas peur de tomber, je n’ai pas peur de mourir. Je descends vraiment plus vite que tout le monde et c’est souvent là que je rattrape tout le monde, a-t-elle souligné.

Quand je voyais des gens abandonner, je me disais qu'ils n'avaient pas vécu grand-chose. Tu ne vas pas mourir d’un mal de ventre ou d’une cheville qui tourne. Je suis déjà passée bien plus proche de la mort que ça.

En 2020, elle a été ennuyée pas d’importants ennuis de santé. On lui a alors retiré une bonne partie du côlon et des intestins. Les médecins l'ont avertie que la course de longue distance serait impossible en raison des risques de déshydratation.

Cette épreuve n'a pas freiné les ambitions de la coureuse. Mais si les courses sur longue distance sont déjà éprouvantes pour le système digestif, Geneviève Asselin-Demers doit quant à elle prendre des précautions particulières.

Pas question, par exemple, d’accepter les tacos épicés qui étaient offerts aux stations de ravitaillement lors de la course au Mexique.

Si je n’avais pas une blessure mécanique ou que ma vie n’était pas en danger, il n’était pas question que j’abandonne. Je n’étais pas prête à assumer l’abandon.

Un mois avant la course au Portugal, elle a dû subir une intervention chirurgicale afin de retirer quelque chose qui avait été oublié lors de la première opération. Ce qui devait être une courte opération sous anesthésie locale d’une vingtaine de minutes s’est transformé en une opération de deux heures sous anesthésie générale.

J’ai reçu le feu vert du médecin le mercredi avant mon départ pour recommencer à courir doucement. Je ne lui ai juste pas dit que je recommençais avec un 115 km, a-t-elle précisé, sourire aux lèvres.

Je veux montrer à mes filles qu’elles peuvent tout faire, qu’il ne faut pas abandonner, même quand c’est difficile.

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