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La soif d’autonomie des jeunes Innus

Deux personnes en tenue de travail discutent.

L'objectif est de permettre à ces jeunes adultes qui reprennent la voie de l'école d'être embauchés à la fin de leur formation.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

Du travail, il y en a à Uashat mak Mani-utenam. Des gens formés pour les postes offerts, un peu moins, toutefois. Alors comme les besoins sont grands, des programmes sont mis en place pour permettre à la communauté de continuer son développement économique, et à ses membres d’entrer sur le marché du travail avec des compétences solides.

En relation avec le Grand cercle économique des Peuples autochtones et du Québec, qui se déroule à Montréal jeudi et vendredi, Espaces autochtones vous présente tout au long de la semaine une série d'articles traitant des enjeux économiques qui représentent des défis autant pour les Premières Nations que pour la société québécoise.

Casque de chantier enfoncé sur la tête, marteau dans une main et clous dans l’autre, la quinzaine d’élèves s’activent sous l’œil avisé de leur professeur. Ils tapent sur de longues planches de bois, prennent des mesures et observent des plans, le tout dans un vacarme insoutenable pour celui qui n’a pas de quoi protéger ses oreilles.

Ces jeunes Innus suivent une formation de charpenterie-menuiserie au Centre régional d’éducation des adultes (CREA) d'Uashat mak Mani-utenam, situé sur le boulevard des Montagnais. Au total, 160 élèves viennent suivre des cours dans ces locaux flambant neufs.

Un bâtiment.

L'établissement offre de nombreuses formations qui collent avec les besoins du marché du travail.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

La révolution économique des Autochtones

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Des mobile en forme d'animaux.

[Ces jeunes] se raccrochent au milieu scolaire. Ils ont pris une pause au niveau de leur parcours scolaire. On veut les emmener le plus loin possible dans la réussite. Notre mission est de trouver une voie pour chacun, explique Gilles Larouche, Innu de Mashteuiash et directeur du CREA depuis deux ans.

Petapenu-Alexandre Pinette-Fontaine, originaire d'Uashat, est l’un d’eux. Le jeune de 20 ans a arrêté l’école durant un an et a décidé de reprendre ses études. Il a choisi de suivre une formation en charpenterie.

Un jeune homme tient une grosse planche en bois dans les mains.

Petapenu-Alexandre Pinette-Fontaine a décidé de reprendre ses études et rêve aujourd'hui d'accumuler les diplômes pour devenir autonome.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

J’aime ça, bouger; je suis un gars manuel, je n’aime pas rester dans un bureau. J’aimerais être embauché, puis devenir apprenti, continuer les études et avoir le plus de diplômes possible pour être autonome, raconte-t-il, avant de rejoindre ses camarades.

Cette soif d’autonomie est partagée par Mia Fontaine. À 36 ans, cette ancienne éducatrice de la communauté a décidé de tout quitter pour se lancer dans la charpenterie. Ça fait longtemps que je le voulais, mais je n’avais pas confiance en moi, avoue-t-elle.

Une femme assise qui lève le pouce.

Mia Fontaine est très fière d'avoir réalisé cette table à pique-nique.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

Indépendante, elle refuse de devoir attendre après quelqu’un pour faire [ses] propres affaires. En montrant du doigt avec une pointe de fierté la table à pique-nique qu’elle a elle-même réalisée, elle raconte combien elle aime toucher le bois et se surprend parfois à blaguer sur son avenir, qu'elle imagine avec un casque blanc sur la tête.

Des formations pertinentes

Peinture, plâtrerie, conduite en voirie forestière ou d’engins de chantier, forage, dynamitage, soins à prodiguer aux bénéficiaires : les formations qui sont proposées au CREA sont nombreuses. Et, surtout, elles n’ont pas été choisies par hasard.

Nous avons un comité consultatif dans lequel chaque communauté innue est représentée. On y recueille les besoins du milieu, détaille M. Larouche, qui ajoute que 13 autres formations seront ajoutées d’ici à l’automne prochain.

Gilles Larouche

Gilles Larouche souhaite qu'une formation sur la gestion d'entreprise soit mise en place.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

Pour aider au prolongement de la route 138, une cohorte d’Innus de Pakua Shipu et d'Unamen Shipu, sur la Basse-Côte-Nord, ont par exemple été formés. Au moment où cette formation a été annoncée, le chef d’Unamen Shipu, Brian Mark, se réjouissait qu’elle soit donnée justement sur la Côte-Nord, et non pas à Québec ou Montréal.

Avec ce programme de formation sur place, l’apprentissage se fera chez nous, évitant aux jeunes d’avoir à s’isoler à l’extérieur pour apprendre un métier. C'est de cette manière, en accompagnant nos jeunes, que nous pourrons véritablement tirer profit du développement économique de notre région, fait-il valoir.

Ces formations couvrent la première jusqu'à la cinquième secondaire.

La route se dresse au loin au-dessus d'une paroi rocheuse. Photo prise le 23 juin 2020.

La route 138, vue de la baie Saint-Pancrace. Bientôt, cette rue sera prolongée.

Photo : Radio-Canada / Benoît Jobin

Les communautés innues de la Côte-Nord se développent à bon train d'un point de vue économique, mais la main-d’œuvre est l’un des piliers de cette réussite. Il ne suffit pas de soutenir des entreprises; il faut aussi trouver des gens formés pour y travailler.

Ces formations s’inscrivent dans le développement économique, car elles mènent à un emploi. Les 13 élèves en voirie forestière ont tous été embauchés; même chose pour ceux qui ont eu une formation en cuisine.

Des enfants qui montent dans un bus scolaire.

Lors du dernier recensement de 2016, l'âge médian de la communauté d'Uashat était de 25 ans, ce qui en fait une population très jeune.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

Beaucoup d'Innus ont exprimé le désir de se lancer en affaires. Le marché du travail est en pleine expansion. De nombreux projets sont en développement, comme Apuiat, des ententes avec les minières, etc. Développer leur propre entreprise, c’est quelque chose qui passionne les élèves, souligne M. Larouche.

Audrey-Lise Mckenzie, de Mani-utenam, raconte que parfois, elle blague avec ses camarades de charpenterie au sujet de l’avenir : On dit qu’on aimerait ça lancer une entreprise. Je ferai la comptabilité et, quand il manque des gars sur les chantiers, j’irai avec eux; ça me plairait comme idée. Un beau défi pour cette trentenaire qui estime qu’encore trop peu de femmes se lancent en affaires.

Niveau de scolarité des 25 ans et plus à Uashat mak Mani-utenam

  • Universitaire : 4 %
  • Collégial : 15 %
  • Écoles de métier : 17 %
  • Secondaire : 8 %
  • Niveau inférieur aux études secondaires : 56 %

Source : Statistique Canada (recensement de 2016)

Pour répondre à ce besoin grandissant d’autonomie, ce besoin de se lancer en affaires, le CREA souhaite démarrer un programme destiné à développer l’entrepreneuriat féminin, et un autre, plus général, qui sera mis en place après les Fêtes.

De quoi fournir de nouvelles cuvées de jeunes entrepreneurs pour cette communauté déjà bien dynamique.

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