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Biosolides des États-Unis : Québec propose un nouveau règlement

Le gouvernement du Québec veut interdire la fertilisation des sols québécois avec des biosolides américains ou des composts qui en contiennent. En décembre dernier, Enquête révélait qu’au moins cinq États américains exportent des boues d’épuration dans la province.

Vue aérienne de biosolides stockés dans deux champs.

Les agriculteurs qui utilisent des biosolides sont surtout des producteurs agricoles propriétaires de grandes superficies, qui n’ont pas accès à du fumier animal à proximité ou qui n’en produisent pas assez.

Photo : Radio-Canada / François Genest

« Troublé » par ce qu’il avait appris dans les reportages de Radio-Canada, le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, avait alors promis d’« accélérer le pas de manière significative » pour que cesse l’importation de boues des États-Unis.

Puisque le commerce à la frontière relève d’Ottawa, il s’attaque au règlement qui encadre l’utilisation de ces matières. Son gouvernement lance donc une consultation de 45 jours qui mènera à l’adoption de modifications du Règlement sur les exploitations agricoles.

L’objectif du gouvernement est d’interdire l’utilisation sous toutes ses formes de boues d’épuration municipales, industrielles ou papetières provenant de l’extérieur du Canada.

Au sud de la frontière, l'État du Maine a déjà interdit cette pratique par mesure préventive. Des tests effectués ont révélé des concentrations importantes de PFAS, appelés contaminants éternels, potentiellement cancérigènes, sur des terres agricoles du Maine.

À l’heure actuelle, on ne connaît pas le seuil de concentration de ces polluants à partir duquel il y a un risque pour la santé des animaux et des humains.

Enquête a démontré que les boues du Maine traversent la frontière pour être utilisées dans des composts fabriqués à Bury, en Estrie, par l’entreprise Englobe. New York, le Vermont, le New Hampshire et le Massachusetts exportent également des biosolides au Québec.

Dans la proposition de règlement, on peut lire que la nouvelle interdiction [...] pourrait avoir un impact sur les entreprises importatrices qui devront trouver d’autres marchés.

Ces entreprises pourront soumettre leurs arguments lors de la consultation publique. L’Ordre des agronomes sera aussi appelé à le faire. Sa présidente, Martine Giguère, a d’ailleurs décliné notre demande d’entrevue, car elle réserve ses commentaires pour la consultation.

En décembre dernier, trois ordres professionnels invitaient leurs membres à la plus grande prudence concernant l’utilisation des biosolides. L’Ordre des chimistes, l’Ordre des agronomes et l’Ordre des médecins vétérinaires soutenaient qu'il y a urgence de légiférer concernant les contaminants d’intérêt émergent, afin de mieux les répertorier et d’outiller les professionnels.

Le président de l’Union de producteurs agricoles (UPA), Martin Caron, se réjouit de ce premier pas franchi. On vient de circonscrire au niveau des biosolides des États-Unis. Ça, en soi, c’est une bonne nouvelle.

Le règlement pourrait entrer en vigueur d’ici deux mois. D’ici là, l’UPA met en garde ses producteurs qui utilisent des biosolides. On leur demande d’être extrêmement prudents.

Plan rapproché d'un amas de boues dans un champ de maïs non récolté.

Les biosolides possèdent plusieurs avantages. Ils sont riches en azote, en phosphore et en matières organiques.

Photo : Radio-Canada / François Genest

Pas de norme pour les biosolides du Québec

Au Québec, il existe des normes sur la concentration dans les biosolides de certaines matières dangereuses comme le plomb, le nickel, le cadmium et l'arsenic. Mais ce n’est pas le cas des PFAS.

Martin Caron soutient qu’une attention particulière doit aussi être portée aux biosolides québécois. On a fait des demandes au ministère [de l’Environnement] pour qu’il y ait des normes, des tests qui soient faits pour sécuriser les producteurs, dit-il.

Pour le moment, le document élaboré par le gouvernement ne touche pas à la réglementation des boues québécoises. Au cabinet du ministre de l'Environnement, on indique que des annonces seront faites au moment opportun.

En collaboration avec des scientifiques de différentes universités, le ministère a entrepris des recherches sur l’incidence de l’épandage de biosolides en agriculture, notamment sur la santé des sols. Les résultats de ces études sont attendus au début de 2024.

Plus d’une quarantaine de municipalités réclament un moratoire

Depuis la diffusion des reportages de La semaine verte et d’Enquête, plus d’une quarantaine de municipalités québécoises ont adopté des résolutions pour que cesse l’importation de biosolides américains et qu’on encadre l’utilisation des boues québécoises.

La MRC des Collines-de-l’Outaouais, la MRC de Lotbinière et la MRC du Val Saint-François en font partie. Cette dernière réclame un cadre réglementaire pour l’épandage de biosolides et d’y inclure les contaminants d’intérêt émergent [comme les PFAS]. De plus, les élus demandent de revoir l’encadrement du recyclage des matières résiduelles fertilisantes [MRF] de manière à éviter que les agronomes de l’industrie ne soient en conflit d'intérêts.

L’automne dernier, Radio-Canada révélait que certains agronomes ont été inscrits au Registre des lobbyistes en tant que promoteurs de boues, tout en demeurant agronomes. L’Ordre des agronomes a alors indiqué s’attendre à ce que ses membres fassent preuve de précaution et évitent à tout prix les situations de conflit d'intérêts, sous peine de sanction.

Le gouvernement souhaite que le nouveau règlement sur les exploitations agricoles contienne des ajustements aux sanctions administratives pécuniaires et aux dispositions pénales pour revoir la gravité de certains manquements et de certaines infractions.

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