Noémie dit oui : un cri de colère retentissant
Un premier long métrage en forme de coup de poing dénonciateur, signé Geneviève Albert.
Noémie, 15 ans, fait une fugue du centre jeunesse où elle vit, après une énième démission de sa mère. En retrouvant une amie qui se prostitue et lui fait miroiter argent facile et vie prestigieuse, elle tombe amoureuse d’un garçon qui l’entraînera sur le même chemin que celui de son amie…
Les pièges d’un miroir aux alouettes, la facilité avec laquelle on peut décider d’une bifurcation qui aura de lourdes conséquences, l’amour dont on trahit le nom pour mieux exploiter quelqu’un, la maternité envisagée comme une montagne parfois impossible à gravir :
Noémie dit oui affronte ces sujets sans avoir froid aux yeux, en ayant l’empathie chevillée aux images.
Car Geneviève Albert ne se contente pas d’observer froidement cette descente aux enfers, bien trop plausible. Non, elle l’accompagne, la rage au cœur, nous faisant constamment sentir sa révolte profonde, sa colère que tout ceci arrive encore et toujours dans une sorte d’indifférence générale.
Ne stigmatisant pas les clients, elle dénonce surtout un système en criant :
Non.Non à la prostitution des jeunes filles, à l’exploitation des corps féminins, à la mascarade qui se tient souvent aux alentours du Grand Prix de F1 à Montréal.
Ce sont autant de cris qu’elle laisse éclater par sa mise en scène, fébrile et naturaliste, en décors et éclairages naturels, qui n’est pas sans évoquer le style d’une Andrea Arnold, dans Fish Tank notamment, ou rappeler cette idée forte soulevée par Anne Émond dans Nelly : la prostitution anesthésie les corps (la scène centrale du film, dans un hôtel où défilent les clients, est aussi parlante que traumatisante).
Bien sûr, pour que cette empathie nerveuse et enragée fonctionne, il fallait une actrice, et Geneviève Albert a assurément fait le bon choix en donnant sa Noémie à Kelly Depeault. Après La déesse des mouches à feu, qui la révélait au cinéma, ou Vacarme, la jeune actrice confirme son talent unique pour interpréter ces jeunes femmes entre intensité à fleur de peau et vulnérabilité agressive.
Une jeune femme perdue, manipulée, qui, derrière sa façade bravache et rebelle, cache mal des failles immenses, et à qui, sans aucun doute, on a envie de dire
oui.
La bande-annonce (source : YouTube)