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La communauté LGBTQ+ inquiète du recul de ses droits

Drapeau aux couleurs LGBT tenu à bout de bras par une personne placée derrière.

La Journée internationale contre l'homophobie et la transphobie a été lancée en 2003 au Québec. (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Canadian Press

La communauté LGBTQ+ tire la sonnette d’alarme. Les crimes haineux liés à l'orientation sexuelle sont en hausse, et les politiques publiques discriminatoires prolifèrent partout dans le monde. À l’occasion de la Journée internationale contre l'homophobie et la transphobie, le constat est sans appel : les droits LGBTQ+ sont en recul non seulement à l'international, mais aussi au Canada.

Devant cette réalité inquiétante, la Fondation Émergence, initiatrice de la Journée internationale contre l'homophobie et la transphobie, célébrée le 17 mai, organise vendredi à Montréal une marche à reculons.

L’organisme souhaite transmettre un message fort que lorsque les droits des personnes LGBTQ+ reculent, c’est toute la société qui revient en arrière, peut-on lire dans un communiqué de la Fondation Émergence.

Des manifestants tiennent une bannière.

À l'occasion de la 22e Journée internationale contre l'homophobie et la transphobie, la Fondation Émergence a organisé à Montréal une « marche à reculons ».

Photo : Radio-Canada / Audrey Neveu

La Journée internationale contre l'homophobie et la transphobie a été lancée en 2003 au Québec par la Fondation Émergence.

La date du 17 mai est une référence au 17 mai 1990, date à laquelle l'Organisation mondiale de la santé a retiré l'homosexualité de sa liste des maladies mentales.

Cette journée de sensibilisation est désormais soulignée dans une centaine de pays partout dans le monde.

Le directeur général de la Fondation Émergence, Laurent Breault, l'admet d’emblée : il y a eu beaucoup d'avancées au cours des dernières années, surtout dans la dernière décennie, sur le plan législatif et sur le plan de l'inclusion, notamment au Québec et au Canada.

Toutefois, insiste-t-il, on observe depuis environ deux ans un effet de ressac sur les questions LGBTQ+.

Laurent Breault en entrevue.

Laurent Breault est directeur général de la Fondation Émergence.

Photo : Radio-Canada

Nos communautés prennent de plus en plus d'espace, gagnent en liberté et en droits, ce qui est bien [...] Sauf que ça crée une réaction chez certaines personnes et certains groupes qui ont des visions homophobes et transphobes, dénonce-t-il.

Cette réaction-là crée de la violence, des discours haineux, des politiques publiques défavorables.

Une citation de Laurent Breault, directeur général de la Fondation Émergence

Le climat a changé

Même son de cloche pour Line Chamberland, sociologue et fondatrice de la Chaire de recherche sur la diversité sexuelle et la pluralité des genres de l'UQAM, qui est d'avis que le climat a changé dans les deux à trois dernières années.

Il y a de l'homophobie qui s'exprime de façon plus ouverte, plus décomplexée, sous toutes sortes de formes.

Une citation de Line Chamberland, sociologue et fondatrice de la Chaire de recherche sur la diversité sexuelle et la pluralité des genres de l'UQAM

Bien qu'au Canada des législations protègent la communauté LGBTQ+, on voit des signaux passer du vert au orange et au rouge, explique à son tour M. Breault.

Une personne tient plusieurs drapeaux de la communauté LGBT.

Des observateurs s'inquiètent des crimes haineux partout dans le monde.

Photo : Getty Images / Vladimir Vladimirov

Selon Statistique Canada, les crimes haineux liés à l'orientation sexuelle ont quadruplé entre 2018 et 2022.

On pourrait parler de certaines provinces qui étudient des projets de loi qui visent à restreindre l'accès aux soins des personnes trans mineures, dit également M. Breault.

En organisant la marche à Montréal, la Fondation Émergence souhaite appeler les gens à faire preuve de vigilance, surtout au niveau des alliés.

On pense souvent qu'on a des acquis, puis qu'on ne [re]viendra pas en arrière. Puis en fait [...] il n’y a rien d'assuré pour l'avenir.

Une citation de Laurent Breault, directeur général de la Fondation Émergence

Controverses médiatisées

Au-delà des crimes haineux et des projets de loi à l'étude, Line Chamberland s'inquiète des nombreuses controverses entourant la communauté LGBTQ+ qui ont fait l’objet de battage médiatique dans les dernières années. Elle cite notamment en exemple la question des transitions de genre chez les jeunes, les toilettes mixtes dans les écoles ou encore les contes lus par des drag queens dans les bibliothèques.

II y a des groupes de droite – disons-le, souvent d'extrême droite – qui émettent des propos comme s'il y avait des controverses, comme si les enfants étaient menacés. Mais est-ce qu'il y a une situation réelle de crise? demande-t-elle.

Je pense qu’il faut se méfier de ces controverses, sinon totalement inventées, du moins poussées, exagérées, entretenues essentiellement dans les journaux, dans les médias sociaux et par des groupes de droite et d'extrême droite.

Une citation de Line Chamberland, sociologue et fondatrice de la Chaire de recherche sur la diversité sexuelle et la pluralité des genres de l'UQAM
Line Chamberland en entrevue.

Line Chamberland est sociologue retraitée et fondatrice de la Chaire de recherche sur la diversité sexuelle et la pluralité des genres de l'UQAM.

Photo : Radio-Canada

S’inquiétant des effets délétères de ces controverses, la sociologue croit qu'il faut commencer à répondre et à défaire les arguments, et montrer notamment à l'aide de recherches que, souvent, ce sont des menaces inventées.

Pour contrer cette montée de la mésinformation entourant la communauté LGBTQ+, elle mentionne par exemple les bienfaits du programme québécois d'éducation à la sexualité dans les écoles, qui inclut bien sûr la diversité sexuelle et de genre.

Et à l’international?

Selon l'Association internationale des personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, trans et intersexes (ILGA World), 62 pays pénalisent actuellement l'homosexualité et 12 pays condamnent à mort les relations entre personnes du même sexe.

Précision

Ce texte a été modifié pour inclure les statistiques les plus récentes d'ILGA World, qui sont reconnues par la Fondation Émergence.

Et la situation des droits LGBTQ+ à l’international s’est dégradée au cours des dernières années, selon la sociologue Line Chamberland. On voit de véritables reculs. Aux États-Unis, par exemple, il y a quelques centaines de projets de loi qui veulent enlever des droits ou limiter les droits des personnes LGBTQ+.

À l'international aussi, on avait progressé dans la décriminalisation de l'homosexualité. Maintenant, au contraire, il y a quelques pays qui veulent criminaliser ou "recriminaliser" l’homosexualité.

Une citation de Line Chamberland, sociologue et fondatrice de la Chaire de recherche sur la diversité sexuelle et la pluralité des genres de l'UQAM

En 2023, à titre d’exemple, l'Ouganda a instauré la peine de mort en cas d’homosexualité aggravée.

Mme Chamberland déplore en outre l’exploitation politique de la question des droits LGBTQ+.

Une personne tient un portrait arc-en-ciel de Vladimir Poutine.

Une manifestation pro-LGBTQ+ à Budapest en 2021 (Photo d'archives)

Photo : Getty Images / GERGELY BESENYEI / AFP

On le voit beaucoup, chacun prétend défendre sa civilisation ou sa culture en se positionnant pour ou contre les droits des personnes LGBT. Par exemple, c'est le conflit entre l'Europe et la Russie et la vision de Poutine.

En novembre dernier, la Cour suprême russe a en effet banni pour « extrémisme » ce qu’elle désigne comme un mouvement international LGBT.

Mais en politisant ces questions LGBTQ+, on fait fi des droits des personnes, lance Mme Chamberland.

Ce qui est important, c'est de ramener ça au droit des personnes. C'est de se rappeler que ce sont des personnes comme tout le monde, des citoyens et des citoyennes qui ont des droits, qui veulent vivre et qui veulent être respectés.

Avec les informations de Danielle Kadjo et Audrey Neveu

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