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Royal « encore plus cynique » au théâtre, selon l’auteur Jean-Philippe Baril Guérard

L'auteur, les mains jointes, assis dans l'escalier rouge du théâtre duceppe

Jean-Philippe Baril Guérard avait publié le roman « Royal » aux Éditions de ta mère en octobre 2016 et il offre maintenant la version adaptée de son œuvre au théâtre, chez Duceppe.

Photo : Élise Jetté

Le Théâtre Duceppe accueille jusqu’au 11 mai l’adaptation du roman Royal de Jean-Philippe Baril Guérard, une version condensée de l’histoire qui nous catapulte dans la rivalité maladive liée à la course aux stages dans les écoles de droit.

J'ai rendu l'histoire encore plus cynique, si une telle chose était possible, affirme l’auteur en riant. Je me suis amusé. Dans le livre, beaucoup de choses étaient résumées, et là, on a besoin de les voir; et ça, c’est vraiment excitant pour moi.

Dans la transposition de son œuvre du roman à la scène, Jean-Philippe Baril Guérard se réjouit de s’être vu offrir le luxe du temps. Le metteur en scène Jean-Simon Traversy a eu la lumineuse idée d'en faire un exercice pédagogique pour des finissants du Conservatoire de théâtre en 2022.

Ce sont ces derniers qui montent sur scène pour donner vie à Royal. On a pu faire énormément d’essais et aller au bout de plusieurs idées qu’on n’a pas faites, finalement, dit l’auteur.

Jean-Simon Traversy partage la mise en scène de Royal avec la danseuse et chorégraphe Virginie Brunelle pour en faire un spectacle extrêmement physique dans lequel les mouvements du corps occupent une place cruciale.

Comme le roman Royal nous invitait dans la tête du narrateur pour y découvrir son point de vue, ses opinions, ses sentiments et son jugement sur le monde, l’adaptation théâtrale devait matérialiser certains concepts et permettre une incarnation de bon nombre d’idées qui demeuraient assez intangibles pour les lecteurs.

Tout le roman se passe dans la tête de mon narrateur et, dans la pièce, il devient l’un des personnages et on ne l’entend pas penser. On est à l’extérieur, comme dans une fiction troisième personne. Donc, ça veut dire que son jugement, on doit le faire surgir sur les autres, son point de vue passe dans l'action dramatique.

Une citation de Jean-Philippe Baril Guérard, auteur

Le message global demeure le même : la compétition pour devenir avocat, ce n’est pas une partie de plaisir. Ça reste l’histoire d’un gars qui débarque à l'Université de Montréal, qui veut son stage et ça ne se passe pas comme il voudrait, puis il tombe dans un trou noir, dit le dramaturge.

Si à la lecture du roman, on constatait rapidement que les personnages secondaires n’avaient pas d’identité propre, ils ont désormais des noms. Ils étaient tellement réduits à des clichés par le narrateur qu’ils ne méritaient même pas de nom, ajoute l’auteur.

La provinciale sportive du livre devient ainsi Rosalie sur la scène du Théâtre Duceppe. Romy Bouchard qui joue ce rôle a vraiment fait un bon travail de recherche, dit-il. Elle est arrivée avec un petit lexique d'expressions de la Beauce. On n'entend pas souvent ça, je trouve, des accents régionaux, au théâtre. Je trouve ça important de le faire.

En touillant la salade, rien ne demeure immobile dans le texte original de Royal et, selon son auteur, seulement 10 % du texte du roman est récité tel quel dans la pièce. Les dialogues ont été remaniés à maintes reprises en répétition, à son plus grand soulagement. Ça m’évite d’avoir la pression d’arriver avec le texte parfait au jour 1, affirme-t-il.

Toutes les versions d’une histoire

Depuis une dizaine d’années, Jean-Philippe Baril Guérard se plaît à passer d’un médium à un autre, pourvu que sa plume rencontre le bon public au bon moment. Et ce n’est pas qu’au théâtre que ses romans trouvent une deuxième vie. Manuel de la vie sauvage (2018) s’est réincarné à la télévision en 2022, tout comme Haute démolition (2021) en 2023.

Pour lui, un immense plaisir émane de toutes les possibilités qui découlent d’une seule et même idée. Je pense qu'il y a tout le temps place à l'amélioration, dit l’auteur. Je pourrais écrire le même roman jusqu'à la fin de mes jours et trouver de meilleures façons de le faire.

Il rappelle également que l’écriture est un métier et qu’une œuvre qui se multiplie en est une qui peut devenir lucrative. Parlons-en de l'aspect monétaire, lance-t-il. Aucun de mes romans n’a été écrit avec des subventions. Le seul argent qui est rentré, c’est celui des ventes de livres et la bourse du Prix littéraire des collégiens (dans le cas de Royal). Je pense que j’ai vendu un peu moins de 50 000 copies de Royal en huit ans. Ça semble beaucoup, mais si tu divises ça par huit ans, c’est loin de te donner un salaire annuel qui te permet d’en vivre.

Adapter une œuvre au théâtre ou à la télévision, c'est très très payant. C'est intéressant parce que c'est comme si tu réussissais à rentabiliser ton investissement, ajoute l’auteur. Ça ne fait pas partie de la motivation première quand je suis en train d'écrire, mais une fois que le livre est écrit et que l'offre tombe, c'est sûr que je serais idiot de dire non à ça.

Gagner sa vie, c’est réjouissant, mais rejoindre les publics là où ils sont permet aux créations de rayonner plus loin et plus longtemps.

Beaucoup de gens m’écrivent pour me dire que je les ai convaincus de lire un livre, mais il reste que beaucoup de lecteurs ne vont pas au théâtre, beaucoup de gens qui aiment le théâtre ne lisent pas, et c’est pareil pour la télévision. Et moi, j’aime parler à tout le monde.

Une citation de Jean-Philippe Baril Guérard, auteur

L’auteur mesure bien la chance qu’il a de pouvoir traverser le temps avec une œuvre qui se renouvelle, voyage et arrive ailleurs. Je trouve ça malade qu'un livre que j’ai écrit il y a huit ans suscite encore la conversation, renchérit-il. Il y en a en maudit des bons livres qui tombent dans l’oubli après deux mois. Le théâtre, ça contribue à l’empreinte que mon livre laisse dans le temps. En le modifiant pour un autre médium, il demeure au goût du jour.

Il explore ainsi, depuis le début de sa carrière, les particularités de chaque médium pour maîtriser l’art d’écrire selon la destination du texte. Le théâtre, je trouve que c'est un bon lieu pour confronter, jouer avec les limites, faire réfléchir en groupe, parce que le mal-être de spectateur, on l'a, on y a accès.

Jamais dépourvu de projets, Jean-Philippe Baril Guérard planche actuellement sur un scénario de film, un projet original coécrit avec Suzie Bouchard.

Je rêve aussi d’écrire sur la politique. Je sais que je ne suis pas prêt. Dans tout ce que j’ai écrit, j’étais toujours quelque part en périphérie de mon sujet. À force d’être en périphérie de la politique, je vais la comprendre, estime-t-il.

Il se retient à deux mains pour ne pas écrire les suites de ses romans qui sont toutes prêtes dans sa tête. Je résiste parce que je ne veux pas avoir l’impression d’écrire toujours la même chose.

Royal est présentée chez Duceppe jusqu’au 11 mai.

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