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Les publicités sur le cannabis abondent en Ontario. Mais sont-elles toutes légales?

Si l'opposition à Queen's Park réclame un meilleur contrôle, des experts croient que d'autres problèmes sont plus pressants.

Une publicité Facebook pour du cannabis.

Une fleur de cannabis séchée est clairement visible dans cette annonce.

Photo : Facebook (capture d'écran)

Elles circulent sur les réseaux sociaux et continuent d'exister grâce à un flou juridique : des publicités sur le cannabis et ses produits dérivés qui semblent contrevenir à la loi fédérale sont omniprésentes en Ontario. Suffit de balayer à quelques reprises l'écran d’un téléphone pour les voir apparaître.

La publicité sur le cannabis est légale au Canada, mais elle est soumise à de nombreuses restrictions. La Loi fédérale sur le cannabis interdit notamment les contenus promotionnels qui présentent un produit ou une marque d’une manière qui l’associe à une façon de vivre. Les publicités qui sont attrayantes pour les jeunes sont aussi proscrites.

Une personne tient un téléphone intelligent avec une publicité sur l'écran.

En octobre 2018, le Canada devenait le premier pays du G20 à légaliser le cannabis. Depuis, beaucoup de détaillants essaient de se démarquer avec des publicités en ligne.

Photo : Radio-Canada / Camile Gauthier

À ce chapitre, les entreprises qui vendent du cannabis sont tenues de prendre des mesures raisonnables pour s'assurer que la promotion n'est pas accessible aux jeunes, ce qui est aussi vrai sur les réseaux sociaux.

Plus facile à dire qu'à faire.

Le flou juridique permet aux joueurs de l'industrie de plus ou moins respecter la loi. Il y aura toujours des problèmes avec les gens qui cherchent à travailler dans les zones grises, souligne l'avocat Eugene Oscapella, qui enseigne au département de criminologie de l'Université d'Ottawa.

Un homme répond aux questions d'une journaliste sur le coin d'une rue en automne.

L'avocat Eugene Oscapella.

Photo : Radio-Canada

Une large discrétion

Il y a une large discrétion au niveau des instances gouvernementales par rapport à ce qui est une publicité qui va être considérée en violation de la loi, observe Me Yann Canneva, du cabinet Langlois Avocats.

Il invite les détaillants à la prudence lorsque vient le temps de réfléchir à une approche publicitaire. Couleur, forme, personnage : tout doit être considéré.

C'est difficile de donner des avis juridiques fermes parce que [la loi] est à contour relativement variable. Mais certainement, la prudence est de mise et il faut être très conservateur à la limite.

Une citation de Me Yann Canneva, avocat au cabinet Langlois Avocats

Selon les experts consultés par Radio-Canada, le modèle de vente retenu par le gouvernement Ford, avec des détaillants privés, plutôt qu'une société d'État, rend la surveillance beaucoup plus difficile.

Un passant devant un magasin de cannabis à Toronto.

Il y a maintenant 1789 détaillants de cannabis autorisés dans la province.

Photo : La Presse canadienne / Christopher Katsarov

Lorsque vous créez ce genre de marché ouvert qui est relativement libre de restrictions, il n'est pas rare d'observer des pratiques illégales de la part de nombreux vendeurs désespérés, explique le professeur de l'Université Brock Dan Malleck, qui se spécialise dans la réglementation des drogues.

D'ailleurs, plus de cinq ans après la légalisation du cannabis au pays, les organismes réglementaires doivent encore rappeler à l'ordre les entreprises qui vont trop loin.

Des milliers de plaintes

Depuis que le cannabis est légal, Santé Canada, qui supervise l'application de la loi fédérale, a reçu 1 472 plaintes concernant de possibles infractions aux interdictions de promotion. De 2021 à 2023, l'agence fédérale a dû intervenir auprès de 268 personnes ou entreprises en raison de non-conformité avec la loi en matière de publicité.

En plus des plaintes, Santé Canada a également recours à diverses activités de surveillance dont l’examen du contenu médiatique.

La Commission des alcools et des jeux de l'Ontario (CAJO) a aussi sa part de responsabilité avec la surveillance des commerces de détail, et par le fait même, la publicité placée à l'extérieur d'une boutique, comme un panneau publicitaire.

Un client marche dans un magasin de cannabis.

Les magasins de cannabis ont fleuri depuis la légalisation en octobre 2018.

Photo : CBC/Justine Boulin

La publicité ne doit pas attirer ou cibler des personnes de moins de 19 ans, précise le site web de la CAJO. Les enseignes ne peuvent pas non plus suggérer ou laisser entendre que la consommation de cannabis est associée au succès ou à la résolution d’un problème.

Même si le nombre de magasins autorisés à vendre du cannabis dans la province a explosé dans les dernières années, la Commission, qui dit analyser régulièrement les publicités sur les réseaux sociaux, parle d'un haut niveau de conformité avec les règles.

Violation des normes provinciales en matière de publicités*

AnnéeviolationsSanctions pécuniaires
2022213000 $
202322 aucune

*sur 1789 magasins autorisés

Source : Source : Commission des alcools et des jeux de l’Ontario

Des mesures trop restrictives... ou laxistes?

Malgré le contrôle provincial et fédéral, les publicités illégales persistent. Mais rien pour inquiéter certains experts. Un cadre réglementaire trop restrictif ou une surveillance trop accrue pourraient aussi avoir l'effet pervers d'encourager le commerce illégal.

Il y a cette volonté de ne pas vouloir trop surveiller [la publicité]

Une citation de Dan Malleck, professeur de l'Université Brock

Comme à la fin de la prohibition d'alcool, les experts anticipent un assouplissement des règles en place, au fil du temps. Il ne serait pas étonnant que le cadre réglementaire s'assouplisse.

En revanche, des spécialistes préviennent que l'initiation au cannabis à un jeune âge augmente le risque de développer une dépendance.

Plus la personne va démarrer l'usage du cannabis tôt dans la vie, plus le risque va être multiplié, souligne Dr Bernard Le Foll, médecin chercheur au Centre de toxicomanie et santé mentale de Toronto (CAMH).

Je sais qu'il y a eu des campagnes un peu illicites, où le cannabis a été présenté de manière positive et là, il y a toute une imagerie qui peut se mettre en place

Une citation de Dr Bernard Le Foll, médecin chercheur, Centre de toxicomanie et santé mentale de Toronto

Selon lui, en plus de patrouiller pour éliminer les publicités illégales sur les réseaux sociaux, les gouvernements devraient déployer plus d'efforts pour sensibiliser les jeunes.

Un manque de volonté politique dit l'opposition

Les publicités illégales, surtout si elles sont attrayantes et dirigées vers les jeunes, continuent d'agacer la députée du NPD de l'Ontario, France Gélinas. La politicienne raconte même en apercevoir régulièrement dans sa circonscription de Nickel Belt, dans le Nord de l'Ontario.

Elles persistent malgré ses signalements. Il n'y a aucune raison pourquoi on ne fait pas le suivi, excepté un manque de volonté politique, lâche France Gélinas.

France Gélinas pose pour une photo.

La députée néo-démocrate ontarienne de Nickel Belt, France Gélinas.

Photo : Radio-Canada / Bienvenu Senga

La députée voudrait qu'on prenne la publicité des produits du cannabis plus au sérieux, comme ça été le cas pour le tabac.

La loi, elle est là, les ressources pour mettre la loi en place, elles sont là, mais y'a rien qui se passe.

Une citation de France Gélinas, porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé

Reste que les agences gouvernementales comme Santé Canada et la CAJO, de même que les corps policiers, ont des ressources limitées pour assurer un certain contrôle au sein de l'industrie. Il faut se demander si ça vaut la peine d'appliquer la loi très très strictement concernant la publicité pour la vente de cannabis, souligne l'avocat Eugene Oscapella.

Les drogues qui tuent méritent l'attention des autorités, bien plus que les publicités sur le cannabis selon lui.

La responsabilité de Meta?

Les propriétaires des plateformes numériques doivent-ils jouer à la police? Meta, la société derrière Facebook et Instagram, indique qu’elle bloque tout contenu qui cherche à vendre, acheter, échanger, donner ou demander des substances non médicinales, et ce, peu importe les lois provinciales ou nationales, en vigueur.

La silhouette d'une personne tenant un cellulaire sur lequel apparaît le logo de Facebook, avec le logo de Meta en arrière-plan.

Photo d'archives

Photo : Reuters / Dado Ruvic

Meta assure que sa technologie de détection est en mesure de repérer la presque totalité des publicités illégales, mais admet que certains contenus publiés sur Facebook contreviennent à sa politique sur les biens et services restreints. La compagnie estime que sur 10 000 contenus consultés, seulement cinq violent ses politiques, en moyenne.

Nos normes publicitaires interdisent les publicités faisant la promotion du THC ou des produits à base de cannabis contenant des composants psychoactifs associés.

Une citation de Porte-parole chez Meta

Meta rappelle que les utilisateurs peuvent signaler les publications qui semblent être en violation des politiques de la compagnie, ce qui déclenche une révision du contenu en question

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