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Traitement de l’obésité : des médecins réclament le remboursement de l’Ozempic

La Régie de l’assurance maladie du Québec ne rembourse présentement le sémaglutide que pour les cas de diabète de type 2.

Le coin d'une boîte d'injecteurs Ozempic, avec le logo de l'entreprise pharmaceutique Novo Nordisk, qui est un dessin de taureau bleu.

Une boîte d'Ozempic, médicament développé par l'entreprise pharmaceutique danoise Novo Nordisk.

Photo : Reuters / George Frey

Entre l’hôtel Clarendon et l’Hôtel-Dieu, dans le Vieux-Québec, il y a quelques centaines de mètres. Sabrina Vallerand fait le trajet à pied. Elle quitte son travail, où elle est femme de chambre, pour se rendre au centre d’hémodialyse de l’hôpital. Pendant quatre heures, trois soirs par semaine, elle est branchée à une machine pour nettoyer son sang. Car ses reins ont cessé de fonctionner.

Depuis quelques mois, son pas est plus léger. Une touche d’espoir brille dans ses yeux. Elle a appris, en novembre dernier, qu’elle avait été placée sur la liste d’attente pour recevoir une greffe de rein. Si tout va bien, d’ici quelques mois, elle retrouvera une vie à peu près normale.

Pour se qualifier, elle a dû se battre. Lorsque ses médecins lui ont diagnostiqué une insuffisance rénale, il y a deux ans, ils lui ont annoncé qu’elle devait perdre 45 kilos, soit une centaine de livres. Il en allait du succès de l'opération. Mme Vallerand a consulté une nutritionniste et changé ses habitudes de vie.

Portrait de Sabrina Vallerand.

Sabrina Vallerand souffre d'insuffisance rénale.

Photo : Radio-Canada

C’est finalement avec l’aide d’un médicament, le sémaglutide, qu’elle a atteint son objectif. Ce médicament-là, il sauve des vies, affirme la femme de 37 ans.

Pénurie et préjugés

Le sémaglutide, connu sous les noms commerciaux Ozempic et Wegovy, a déclenché une révolution dans le traitement de l’obésité. D’abord mis au point pour traiter le diabète de type 2, ce médicament connaît une popularité fulgurante depuis qu’on sait qu’il fait perdre du poids.

Des personnalités publiques ont admis en prendre pour retrouver la ligne. Depuis, les prescriptions ont explosé. À tel point que des spécialistes de la santé disent s’inquiéter des abus.

Au même moment, des personnes extrêmement malades qui souffrent d’obésité peinent à y avoir accès.

Pour certains de mes patients, c’est une question de vie ou de mort.

Une citation de Dre Marie-Philippe Morin, spécialiste en médecine bariatrique à l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec
La Dre Morin en consultation.

La Dre Marie-Philippe Morin est une spécialiste en médecine bariatrique de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie, à Québec.

Photo : Radio-Canada

L’Ozempic, le Wegovy et le Mounjaro (un autre médicament de la même catégorie) sont actuellement en pénurie au Canada. Et ceux qui arrivent à trouver des doses doivent avoir les poches profondes. L’Ozempic peut coûter jusqu’à 400 $ par mois si on prend la dose la plus élevée.

La Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) assume les coûts uniquement pour les patients atteints de diabète de type 2. Ceux qui le prennent pour perdre du poids doivent payer de leur poche.

La Dre Marie-Philippe Morin se bat pour que les patients qui souffrent d’obésité aient accès au sémaglutide.

S’il s’agissait d’un médicament pour traiter le cancer, tout le monde demanderait à la RAMQ de rembourser, dit-elle. Mais les personnes qui souffrent d’obésité sont stigmatisées. Alors on ne paie pas.

Des fioles d'ozempic.

Le reportage de Dominique Forget et de Yanic Lapointe présenté à l'émission « Découverte »

Photo : Radio-Canada

La science de l’obésité

La décision de ne pas rembourser les médicaments contre l’obésité a été prise par le gouvernement du Québec à une époque où ces médicaments augmentaient les risques cardiovasculaires et n’étaient pas très efficaces.

Or, la science de l'obésité a beaucoup évolué depuis.

On comprend mieux le rôle des hormones qui se cachent derrière la faim. La GLP-1, par exemple, est produite dans l’intestin après la consommation d’aliments. Elle agit sur le cerveau pour signaler que l’estomac est plein. La GLP-1 ralentit aussi la vidange de l’estomac. Elle prolonge le sentiment de satiété après un repas.

Chez certaines personnes qui souffrent d’obésité, les signaux hormonaux associés à la satiété seraient un peu plus faibles, explique la Dre Morin. D’où l’intérêt de prescrire une médication. Le sémaglutide est un agoniste de la GLP-1. C'est-à-dire qu’il produit le même effet : il coupe l’appétit.

Les patients à qui l’on prescrit des médicaments comme l’Ozempic devront probablement les prendre tout au long de leur vie. Autrement, ils risquent de reprendre les kilos perdus.

Les gens qui souffrent de maladie pulmonaire chronique due au tabagisme, on leur paie leurs pompes toute leur vie, fait valoir la Dre Morin. C'est pareil pour les patients qui souffrent d’hypertension ou de diabète de type-2. Pourquoi est-ce qu’on ne paierait pas pour ceux qui souffrent d’obésité?

Les ados aussi

Au Canada, le sémaglutide n’est pas encore approuvé pour la perte de poids chez les enfants, mais la Dre Mélanie Henderson, pédiatre et endocrinologue au Centre hospitalier universitaire (CHU) Sainte-Justine, à Montréal, a commencé à le prescrire à des adolescents qui sont à court d’options.

On l'utilise chez les enfants pour le diabète depuis un bon nombre d'années, souligne-t-elle. Donc, ce n'est pas une molécule pour laquelle on n’a aucune expérience.

Elle aussi se bat pour que la RAMQ rembourse le sémaglutide pour les patients qui en ont le plus besoin.

Portrait de la Dre Henderson.

La Dre Mélanie Henderson est pédiatre et endocrinologue au Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, situé à Montréal.

Photo : Radio-Canada

L'obésité, ce n’est pas un choix personnel. C'est une maladie chronique, multifactorielle, et la génétique y est pour beaucoup.

Une citation de Dre Mélanie Henderson, pédiatre et endocrinologue au CHU Sainte-Justine de Montréal

L’activité physique, la saine alimentation et la réduction du temps d’écran sont au cœur du traitement proposé au CHU Sainte-Justine. Mais chez certains, ces efforts n’ont pas les résultats escomptés. Et les complications de l’obésité chez les jeunes sont généralement plus graves que chez l’adulte, notamment en ce qui a trait au diabète de type 2.

Tout comme la Dre Morin, la Dre Henderson voit régulièrement des patients incapables de se payer le médicament qui pourrait changer leur vie.

Si on n’aide pas les jeunes en bas âge, les conséquences sur le système de santé vont être catastrophiques, dit-elle. On n’a pas encore vu l'impact de l'épidémie d'obésité pédiatrique sur les besoins en matière de santé lorsque ces jeunes-là vont arriver à l'âge adulte.

Autrement dit, ne pas rembourser le sémaglutide aujourd’hui finira par coûter beaucoup plus cher demain, croit-elle

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