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Les affaires capillaires, un moyen de tresser son avenir

Une tête en train d'être coiffée.

La réalisation des fausses locks peut demander jusqu'à 6 heures de travail.

Photo : Radio-Canada

Le fait d'immigrer dans un nouveau pays s'accompagne de défis, et les cheveux en font partie. Afin de pouvoir reproduire certaines coiffures et tresses traditionnelles à moindre coût, de jeunes femmes afrodescendantes trouvent le moyen de s'entraider à Winnipeg pour rester coquettes.

Originaire du Cameroun, Francine Oyoa, qui est étudiante en sociologie à l'Université du Manitoba, a une passion pour l’art de la coiffure.

Francine Oyoa

Francine Oyoa est autodidacte et elle continue de perfectionner son art.

Photo : Radio-Canada

Au Cameroun, j’avais une voisine qui était tresseuse et elle avait tout le temps des gens qui venaient chez elle pour se faire coiffer. Je suis vraiment curieuse, donc j'allais souvent m'asseoir pour la regarder, raconte la jeune femme.

Ce spectacle sur le pas de sa porte l'a conquise et l'a poussée à mettre la main à la pâte. Elle a donc commencé à faire des coiffures sur la tête d'une poupée offerte par sa mère, avant de s'attaquer à celle de sa petite sœur, Danielle.

Francine coiffe sa petite soeur Danielle, face au miroir.

Pour les deux soeurs, se coiffer ensemble est un véritable moment de complicité.

Photo : Radio-Canada

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Un dessin de personnes noires dans une prairie

J'étais la première personne qu'elle a tressée et j'ai continué à être la seule personne qu'elle tressait pendant longtemps, surtout quand on est venues ici, se rappelle Danielle Nsegeu, en repensant à leur arrivée au Canada en famille, en 2012.

Je me considérais comme sa tête de Barbie, je lui demandais de faire quelque chose et elle allait faire quelque chose de complètement différent (rires).

Une citation de Danielle Nsegeu, petite sœur de Francine

Les deux sœurs ont passé des heures à essayer différents modèles et différentes couleurs en jonglant entre l’échec et la réussite. Au fil du temps, Danielle Nsegeu s'est rendu compte du talent de sa sœur et l'a poussée à proposer ses services à d'autres personnes.

Francine Oyoa a joint l’utile à l’agréable en aménageant un espace réservé à sa passion dans le sous-sol de sa maison. On y trouve un miroir, une chaise et quelques peignes.

Elle a ensuite commencé à proposer ses services à ses amies autour d’elle pour un montant symbolique ou en échange de pouvoir s’exercer sur leurs chevelures, aussi diverses soient-elles.

Une coiffeuse est en train de tresser une mèche de cheveux.

L'art des tresses nécessite un sens du détail poussé et beaucoup de patience.

Photo : Radio-Canada

Dans les salons de coiffure professionnels spécialisés dans les cheveux texturés, les chiffres grimpent rapidement pour ce type de prestations et peuvent facilement atteindre 300 $ ou plus. C'est un coup dur pour les petits budgets de jeunes étudiantes.

C'est là que la solidarité féminine prend toute sa place. En Afrique, on s'entraide, on est toujours là à prêter la main à l'une ou l'autre. Il y a cette sororité qui est entre nous et c'est du genre : "OK tu me fais ci, je pourrais te faire ça", raconte Francine Oyoa.

L'étudiante peut, par exemple, tresser les cheveux d'une de ses amies en échange d'une coiffure pour elle-même ou un raccompagnement en voiture.

La plupart du temps, pour aider Francine à gagner en expérience et se perfectionner, ses proches acceptent de prêter leur chevelure en échange de quelques dollars, trois fois moins que ce qui est attendu sur le marché.

C’est la meilleure!

Amala Hutchison-Jones fait partie de celles qui ont accepté de se prêter à l’exercice.

C’est la meilleure! déclare-t-elle fièrement. Cette amie de Francine lui a confié ses cheveux plusieurs fois, en toute connaissance de cause, et elle ne s’est plus arrêtée. Sa satisfaction a continué de grandir au fil du temps.

Amala Hutchison-Jones regarde son reflet dans un miroir pendant qu'elle se fait tresser par une coiffeuse

Amala Hutchison-Jones a confié ses cheveux à Francine plus d'une dizaine de fois.

Photo : Radio-Canada

Je ressors toujours d’ici avec un gros sourire et je reçois plusieurs compliments par rapport à ma coiffure de la part de ma famille, de mes amis et de mes collègues de travail.

Une citation de Amala Hutchison-Jones, amie de Francine

Toutefois, la coiffeuse en herbe rencontre de vrais défis avec cette passion et elle remet souvent en question son rêve de faire de cette passion un métier. La réalisation des tresses demande beaucoup de temps et de patience, et ce, dans une situation pas véritablement confortable.

Rester debout pendant 5 heures, 6 heures, parfois même 7 heures ou plus… Les pieds font mal, le dos fait mal, parfois les épaules font mal et les doigts aussi.

Une citation de Francine Oyoa, étudiante à l’Université du Manitoba

Même si elle affronte l’adversité avec le sourire, elle reconnaît l’impact de ce travail sur sa santé physique.

Si, demain, je décide d'ouvrir quelque chose, ça veut dire qu’il y aura beaucoup plus de demandes et donc, ça veut dire que tu dois être debout peut-être toute la journée, dit-elle sur un ton inquiet.

Malgré ces défis, Francine Oyoa se permet encore de rêver d'un avenir dans ce milieu.

Francine regarde un paquet de mèches capillaires synthétiques.

Les paquets de mèches sont numérotés en fonction de leur couleur. Francine Oyoa les connaît par cœur et sait retrouver la teinte exacte qui lui convient.

Photo : Radio-Canada / Lindsay Gueï

Dès qu’elle peut, elle improvise une promenade dans son magasin préféré. Elle connaît par cœur les rayons où on peut trouver divers produits capillaires, ainsi que des mèches et des extensions de toutes sortes.

Francine Oyoa s'évade ainsi dans ce monde magique qui l'aide à imaginer son propre espace ou sa prochaine coiffure.

La jeune femme ne sait pas encore ce qu'elle veut faire après l'obtention de son diplôme, mais elle est sûre qu’elle continuera d’alimenter sa passion, une tresse à la fois.

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