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Il y a 50 ans, un festival de films féministe remuait l’industrie du cinéma canadien

En 1973, 180 films ont été présentés au Women & Film International Festival. S’arrêtant dans 19 villes canadiennes, l’événement était alors le plus grand rassemblement mondial consacré au cinéma produit par des femmes. Cinquante ans plus tard, une doctorante redonne vie au festival à travers ses reliques.

Une affiche promotionnelle du Women & Film International Festival.

Depuis plusieurs mois, Cleo Sallis-Parchet rassemble des archives du Women & Film International Festival en vue de la cataloguer et de les rendre accessibles au public.

Photo : Radio-Canada / Yanick Lepage

D’une boîte brune posée sur une table de la bibliothèque d’archives du Festival international du film de Toronto, Cléo Sallis-Parchet déballe des bobines de film, des photos, des calepins de notes et des affiches promotionnelles.

Le regard attentif de la gestionnaire de l’établissement en témoigne, le contenu de la boîte est loin d’être anodin. Ce sont là une partie des vestiges du Women & Film International Festival que Mme Sallis-Parchet rassemble depuis des mois.

C'est très spécial pour quelqu'un qui travaille au TIFF de voir ce matériel.

Une citation de Natania Sherman, gestionnaire principale, TIFF Reference Library
Cléo Sallis-Parchet retire une boîte d'une étagère de la bibliothèque d'archives du Festival international du film de Toronto.

Les archives rassemblées par la doctorante de l'Université York sont entreposées à la bibliothèque d'archives du Festival international du film de Toronto.

Photo : Radio-Canada / Yanick Lepage

La démarche de la doctorante en études cinématographiques et médiatiques à l’Université York a débuté par une coïncidence. Alors qu’elle suivait une formation chez le distributeur d’art visuel torontois Vtape, l’une des organisatrices du festival féministe de 1973 y a déposé des archives de l'événement.

On m’a donné ce matériel pour que je le numérise et c'est comme ça que je suis tombée sur ces magnifiques images, explique-t-elle.

Mme Sallis-Parchet ne voulait pas être parmi les dernières personnes à poser l'œil sur les bobines de film d’un festival qui, selon plusieurs, a transformé le visage du cinéma canadien. En rendant ces archives accessibles, elle espère préserver l’héritage de cet événement marquant du mouvement féministe des années 1970.

J'avais envie de célébrer leurs exploits et de montrer l'importance de cet événement qui demeure méconnu, indique-t-elle.

Ouverture sur le cinéma au féminin

Pendant dix jours en juin 1973, le Women & Film International Festival a été l’occasion pour le public torontois de découvrir des centaines de films produits par des réalisatrices, notamment la créatrice abénaquise Alanis Obomsawin, la Québécoise Mireille Dansereau et la cinéaste française Agnès Varda.

C’était un événement formidable, se remémore Kay Armatage, l’une des organisatrices du festival et professeure émérite d’études cinématographiques à l’Université de Toronto.

Portrait de Kay Armatage.

Au début des années 1970, Kay Armatage était l'une des seules chercheuses canadiennes à s'intéresser au cinéma produit par des réalisatrices.

Photo : Radio-Canada / Yanick Lepage

[Il y avait] des films diffusés jour et nuit, des ateliers, des conférences et toute une série d'événements gratuits pour le public. Tout était gratuit. C’était essentiel à ce qu’on essayait de faire, poursuit-elle.

Soucieuses de rendre l’événement le plus accessible possible, les organisatrices avaient notamment prévu un service de garderie sur place.

Évidemment qu’il y avait un service de garderie. C’était un événement féministe.

Une citation de Kay Armatage, organisatrice du Women & Film International Festival de 1973

Fort de son succès à Toronto, le festival s’est ensuite déplacé dans 18 autres villes canadiennes, remplissant à chaque fois les salles de cinéma du pays.

La réception a été phénoménale. [...] Dans chaque ville, les gens mettaient leurs plus belles tenues fleuries [pour assister au festival], détaille Mme Armatage.

L'événement était l'occasion de promouvoir le travail de réalisatrices dont les films étaient rarement présentés au grand public.

Le film au féminin, c’était un mystère complet à l’époque. Tout ce qu’il y avait dans les cinémas commerciaux et même dans les galeries d'art, c'était des films de célèbres cinéastes de genre populaire ou d'avant-garde, raconte la professeure émérite.

Le public était ainsi pour la première fois exposé à des longs métrages, des films d’aventure, des films expérimentaux et des courts métrages que des femmes avaient réalisés, enchaîne-t-elle.

Devant le succès d'événements comme le Women & Film International Festival, des organismes culturels de l’époque ont été forcés de revoir leur approche.

L’Office national du film du Canada a certainement été inspiré. Les femmes dans différentes divisions de l’Office ont vu que c’était possible, et que beaucoup de femmes au Canada étaient capables de faire des films, explique Mme Armatage.

Un festival qui n’a jamais reçu son dû

Plusieurs des [organisatrices du festival] ont eu de grandes carrières en tant que cinéastes canadiennes, note Natania Sherman, gestionnaire principale du TIFF Reference Library.

C'est formidable de pouvoir enfin célébrer leurs exploits. [...] C’est un morceau de l’histoire du cinéma canadien qui n’a jamais vraiment reçu son dû, ajoute-t-elle, emballée de la démarche de Mme Sallis-Parchet.

C’est notamment grâce à l’obtention d’une bourse du TIFF que la doctorante à l’Université York a pu débuter son travail d’archivage.

Selon Mme Sherman, l’implication de l’organisme culturel torontois dans le projet était naturelle, compte tenu de la forte connexion entre le Women & Film International Festival et le TIFF, fondé trois ans plus tard sous le nom de Festival of Festivals.

Lorsque nous aurons fini de cataloguer le matériel, il sera mis à disposition sur notre site Internet. Les gens pourront venir visiter gratuitement [les archives]. Ils seront beaucoup plus accessibles aux chercheurs et aux jeunes cinéastes qui pourront s'en inspirer, explique la gestionnaire principale du TIFF Reference Library.

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Aux dires de Mme Sallis-Parchet, les reliques du festival couraient le risque de tomber dans l’oubli s’ils demeuraient dans des collections privées.

Après 50 ans, il était temps de les rendre accessibles à tous, soutient la doctorante en études cinématographiques et médiatiques.

Elle présentera en octobre prochain une exposition au TIFF Reference Library mettant en vedette les documents, les photos et le matériel audiovisuel du Women & Film International Festival qu'elle a rassemblés.

L'exposition mettra en lumière l'influence du festival de 1973 sur le cinéma canadien et sur les mouvements féministes aux pays.

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