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La quête pénible des Autochtones pour trouver un logement à La Tuque

Des logements à La Tuque.

En raison de la pénurie de logements à La Tuque, les propriétaires indiquent qu'ils ont l’embarras du choix en matière de locataires potentiels.

Photo : Radio-Canada / Josée Ducharme

Kellyna Coocoo, mère de quatre enfants, cherche depuis plus de trois ans un logement à La Tuque. Elle multiplie les appels et les messages sur Facebook, mais elle dit qu'elle reçoit toujours le même message de la part des propriétaires : « C’est déjà loué. »

Quelques jours plus tard, elle voit que ces mêmes logements, supposément déjà loués, sont toujours libres. Ça fait trois ans et demi qu’on me dit non. Même si on travaille, moi et mon conjoint, le monde ne nous accepte pas, indique-t-elle.

Selon elle, les propriétaires latuquois refusent de lui louer un logement en raison des préjugés qu’ils ont envers les Autochtones.

Ils pensent qu'on va faire du grabuge, qu’on va mettre de la grosse musique, faire des partys, qu'on va détruire le logement.

Une citation de Kellyna Coocoo
Kellyna Coocoo.

Kelly Coocoo habite présentement dans une habitation à loyer modique (HLM). Elle dit que son logement actuel est beaucoup trop petit pour sa famille grandissante.

Photo : Radio-Canada / Josée Ducharme

De nombreux propriétaires latuquois affichent des logements destinés exclusivement aux travailleurs forestiers ou aux étudiants, ce qui désavantage, selon Kellyna, des familles comme la sienne.

C'est choquant. Il y a beaucoup de familles qui se cherchent de beaux logements. J'aimerais qu'ils nous donnent une chance, demande-t-elle.

Une réalité répandue

L’histoire de Kellyna s’apparente à celle de nombreux Latuquois autochtones.

Rosaire Moar cherche un logement depuis plus d’un an. Il attend impatiemment le moment où il aura un endroit bien à lui, où il pourra se sentir en sécurité.

Or, lorsqu’il fait des démarches, il obtient la même réponse que Kellyna.

Aussitôt que je nomme mon nom, ça sonne indien, ça sonne alcoolique [...]. Peut-être que si mon nom de famille était Hudon au lieu de Moar, ça fonctionnerait.

Une citation de Rosaire Moar
Rosaire Moar.

Rosaire Moar continue d'essayer de se trouver un logement en écrivant à des propriétaires sur Facebook.

Photo : Radio-Canada / Josée Ducharme

ll y a beaucoup de discrimination. Il ne faut pas avoir peur des mots : il y a du racisme et de la xénophobie, fait remarquer Claude Jalette, coordonnatrice pour InfoLogis Mauricie.

Elle ajoute que plusieurs personnes autochtones se retrouvent en trop grand nombre dans un même logement ou même en situation d'itinérance et que plusieurs vivent de la détresse psychologique.

S’allier avec des allochtones pour obtenir un logement

Sheryl Bellemare, elle-même une Autochtone, a des parents adoptifs allochtones. Elle remarque que ceux-ci sont traités de façon différente.

Quand c’est moi qui écrivais à des propriétaires [sur Facebook], ça ne répondait pas. [...] Quand mon père d'accueil appelait, là, ça répondait, déplore-t-elle.

Se butant à ce genre de situation, de nombreux Autochtones font appel à des personnes allochtones pour les assister dans leurs démarches. C’est le cas de l’amie de Sheryl Bellemare.

Quand c’était l’allochtone qui contactait le propriétaire, il y avait des disponibilités et un prix abordable. Par contre, quand c’était mon amie autochtone, soit le logement n'était plus disponible, soit il était deux fois plus cher, raconte-t-elle.

Sheryl Bellemare estime que les propriétaires généralisent.

On dirait qu'ils nous mettent tous dans le même bateau que les Autochtones. [...] Moi, je ne bois pas, je suis tranquille et je paie mes affaires.

Une citation de Sheryl Bellemare

Qu’en disent les propriétaires?

Radio-Canada a récolté le témoignage de nombreux propriétaires latuquois. La majorité d’entre eux ont rejeté les reproches de discrimination. Certains ont même dit accueillir plusieurs locataires issus des Premières Nations dans leurs immeubles à logements.

D’autres propriétaires ont avoué qu'ils ont des réticences quant aux locataires autochtones. L’un d'eux, qui souhaite rester anonyme, dit avoir eu plusieurs mauvaises expériences avec des locataires autochtones.

Le propriétaire en question mentionne plusieurs problèmes comme le bruit excessif et l’insalubrité. Il souligne qu’un de ses locataires autochtones cause tellement de problèmes que les autres locataires des logements adjacents sont sur le point de quitter l’immeuble.

Des boîtes à lettres.

Certains propriétaires ont avoué avoir des réticences quant aux locataires autochtones.

Photo : Radio-Canada / Josée Ducharme

En raison de la pénurie de logements à La Tuque, les propriétaires indiquent qu'ils ont l’embarras du choix en matière de locataires potentiels. Ainsi, ce propriétaire avoue placer les personnes autochtones en bas de la liste.

Rosaire Moar reconnaît que certains locataires autochtones ont des comportements problématiques, mais il estime qu’il s’agit d'une infime partie. Il y en a une poignée qui ne fait pas ce qu’il faut et c’est nous autres qui payons pour, affirme-t-il.

Teresa Moore Iserhoff, coordonnatrice au centre d’amitié autochtone de La Tuque, abonde dans ce sens. Selon elle, il y a autant de locataires problématiques chez les allochtones que chez les Autochtones.

Elle se réjouit tout de même de voir que certains propriétaires latuquois démontrent de l’ouverture envers les locataires autochtones. Elle souhaite qu’il y en ait de plus en plus.

Kellyna Coocoo n’a plus espoir que les choses changent. Elle se dit tannée et fatiguée de chercher un logement. Elle a récemment pris la décision de quitter La Tuque pour retourner dans sa communauté de Wemotaci.

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