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Le Canada impose des sanctions contre des colons israéliens extrémistes, une première

Une voiture en feu.

Une voiture appartenant à un villageois palestinien a été incendiée par des colons israéliens qui ont pris d'assaut le village de Kousra en Cisjordanie occupée, le 13 avril 2024.

Photo : middle east images/afp via getty / WAHAJ BANI MOUFLEH

La journaliste Rania Massoud.
Rania Massoud

Après les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Union européenne, c’est au tour du Canada d’imposer des sanctions contre des colons israéliens extrémistes, accusés d’être responsables de violences visant des Palestiniens en Cisjordanie occupée.

C’est la première fois que le gouvernement de Justin Trudeau, qui a déjà annoncé plusieurs sanctions contre des responsables du Hamas, impose des sanctions contre des colons israéliens. La ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, avait annoncé en février envisager de telles sanctions (nouvelle fenêtre).

Dans un communiqué, Affaires mondiales Canada indique que les nouvelles sanctions comprennent des restrictions financières et de déplacement imposées à quatre individus, accusés d’avoir commis des actions violentes et déstabilisatrices contre des civils palestiniens et leurs biens en Cisjordanie.

Avec ces mesures, nous envoyons un message clair selon lequel les actes de violence extrémistes des colons sont inacceptables et que les auteurs de telles violences en subiront les conséquences.
Une citation de Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères du Canada

Les individus visés sont David Chai Chasdai, Yinon Levi, Zvi Bar Yosef et Moshe Sharvit. Tous figurent sur la liste des colons sanctionnés par les États-Unis. Les nouvelles sanctions interdisent aux Canadiens de faire des transactions avec ces colons, qui sont désormais interdits de territoire au Canada.

Des Palestiniens inspectent l'intérieur d'une maison incendiée.

Des Palestiniens inspectent l'intérieur d'une maison incendiée par des colons israéliens à Turmusayya, en Cisjordanie.

Photo : Associated Press / Majdi Mohammed

Détails sur les colons sanctionnés

  • David Chai Chasdai est accusé d'avoir fomenté une émeute dans la ville palestinienne de Huwara, au sud de Naplouse, ayant entraîné la mort d'un civil palestinien.
  • Yinon Levi est quant à lui accusé de diriger un groupe de colons autour de l'avant-poste de Meitarim ayant agressé des civils palestiniens et bédouins, brûlé leurs champs et détruit leurs biens.
  • Moshe Sharvit, de son côté, « a harcelé, menacé et attaqué à plusieurs reprises des civils palestiniens et des défenseurs israéliens des droits de la personne », selon le département d'État américain, faisant notamment fuir 100 Palestiniens après leur avoir ordonné de partir.
  • Enfin, Zvi Bar Yosef a été accusé par Washington de « violences répétées contre les Palestiniens » et de blocage de l'accès à leurs terres.

Le Canada ne reconnaît pas le contrôle permanent exercé par Israël sur les territoires occupés en 1967, dont le plateau du Golan, la Cisjordanie, Jérusalem-Est et la bande de Gaza.

Les colonies israéliennes dans les territoires occupés sont contraires à la quatrième Convention de Genève, peut-on lire sur le site d’Affaires mondiales Canada. Elles constituent en outre un obstacle sérieux à l'instauration d'une paix globale, juste et durable.

Les actes de violence menés par des colons extrémistes en Cisjordanie sont montés en flèche depuis l’attaque sanglante du Hamas en Israël le 7 octobre dernier.

Des centaines d'attaques en sept mois

Selon le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires, il y a eu 1096 attaques de colons contre des Palestiniens en Cisjordanie depuis le 7 octobre, faisant au moins 10 morts.

Par ailleurs, depuis le début de la guerre à Gaza, 426 Palestiniens, dont 107 enfants, ont été tués par des tirs de l’armée israélienne en Cisjordanie, toujours selon l’ONU.

Plusieurs organisations internationales de défense des droits de la personne accusent le gouvernement d’extrême droite du premier ministre Benyamin Nétanyahou d’alimenter la violence des colons en Cisjordanie.

Le gouvernement israélien compte d’ailleurs d'ardents défenseurs de la colonisation (nouvelle fenêtre), dont le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, chef du parti d'extrême droite Force juive.

Ottawa appelé à faire plus

Dans un rapport publié en avril, Human Rights Watch accuse l’armée israélienne d’avoir pris part à des attaques de colons en Cisjordanie, qui ont entraîné le déplacement de Palestiniens de 20 communautés et le déracinement complet d’au moins sept communautés depuis le 7 octobre.

Se basant sur des témoignages de victimes de ces violences, l’ Organisation non gouvernementale accuse les colons d’avoir agressé, torturé et commis des violences sexuelles contre des Palestiniens, en plus d’avoir volé des terres et détruit des maisons et des écoles en Cisjordanie.

Interrogée par Radio-Canada, Farida Deif, la directrice de Human Rights Watch au Canada a affirmé que le problème des violences perpétrées contre les Palestiniens ne se limitait pas à quelques brebis galeuses parmi les colons, accusant les autorités israéliennes de complicité.

Pour résoudre ce problème de manière significative, le Canada devrait interdire le commerce avec les colonies, suspendre l’aide militaire à Israël et soutenir les efforts de justice en cours à la Cour pénale internationale (nouvelle fenêtre), a-t-elle dit.

Un homme tient dans la main un téléphone sur lequel on voit un homme armé dans un camp d'oliviers.

Un homme montre la photo d'un colon israélien armé, dans le village d'As-Sawiyah, au sud de Naplouse, en Cisjordanie occupée, le 29 novembre 2023. Un Palestinien a été tué fin octobre dans ce village par un colon israélien alors qu’il cueillait des olives près de son domicile.

Photo : Getty Images / AFP/KENZO TRIBOUILLARD

L'armée israélienne a, de son côté, affirmé à plusieurs reprises qu'elle s'efforçait de protéger toutes les personnes vivant en Cisjordanie et que les plaintes concernant les soldats faisaient l'objet d'enquêtes.

Contacté par Radio-Canada, le consulat d’Israël à Montréal n’a pas répondu à nos demandes.

Dans une lettre envoyée plus tôt jeudi au premier ministre Justin Trudeau, l’ Organisation non gouvernementale Canadiens pour la justice et la paix au Moyen-Orient (CJPMO) a appelé le gouvernement canadien à utiliser tous les moyens à sa disposition pour lutter contre la colonisation israélienne illégale en Cisjordanie.

Le groupe, qui qualifie les sanctions annoncées de bon début, invite Ottawa à adopter différentes mesures, dont l’interdiction des foires immobilières qui vendent des propriétés situées dans des colonies en Cisjordanie occupée.

L’ Organisation non gouvernementale appelle aussi le gouvernement à suspendre l'accord de libre-échange Canada-Israël (ALECI) et à mettre fin à tout commerce avec les colonies israéliennes dans les territoires palestiniens occupés.

Des centaines de colonies juives illégales ont vu le jour en Cisjordanie depuis 1967. Quelque 490 000 Israéliens résident sur ce territoire occupé, où vivent environ 2,9 millions de Palestiniens.

Un nouveau quartier dans une région montagneuse d'Israël vu des airs.

En juin dernier, le gouvernement israélien a donné son feu vert à la construction de milliers de maisons dans des colonies de la Cisjordanie.

Photo : Associated Press / Ohad Zwigenberg

Nouvelle aide humanitaire à Gaza

Parallèlement, le Canada s’est dit gravement préoccupé par la situation humanitaire catastrophique à Gaza et par les informations faisant état d’une offensive terrestre à Rafah.

Une opération militaire à Rafah aurait des conséquences désastreuses, a indiqué jeudi dans un communiqué Affaires mondiales Canada, tout en annonçant une aide de 65 millions de dollars pour soutenir la fourniture de nourriture, d’eau, d’aide médicale d’urgence dans la bande de Gaza.

Cette somme comprend un paiement récurrent de 25 millions de dollars attribué à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), annoncé précédemment en juin 2023, ainsi que 40 millions de dollars supplémentaires attribués à l’UNRWA et à d’autres partenaires chevronnés et fiables dans la région, notamment la Croix-Rouge canadienne et d’autres organisations non gouvernementales canadiennes, indique le communiqué.

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La journaliste Rania Massoud.
Rania Massoud

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