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Le changement de politique de la Colombie-Britannique concernant les drogues inquiète

Une dame plante au sol un portrait d'un proche disparu.

À l'échelle de la Colombie-Britannique, près de 70 % des victimes de surdose sont âgées de 30 à 59 ans (photo du 31 août 2023).

Photo : Radio-Canada / Ben Nelms

La Presse canadienne

Les défenseurs des consommateurs de drogues s'inquiètent de la demande de la Colombie-Britannique à Santé Canada de resserrer la décriminalisation.

Vendredi, la province a déclaré qu'elle souhaitait autoriser la police à intervenir lorsqu'elle constate la consommation de drogues illicites dans les espaces publics, comme les parcs, les transports et les hôpitaux.

Pour plusieurs, cela pourrait être un pas en arrière dans la lutte contre la crise mortelle des opioïdes.

Un rassemblement pour les personnes mortes à la suite d'une overdose présumée de drogues illicites a lieu à Vancouver le 9 février 2022.

Cela fait huit ans que la Colombie-Britannique a déclaré que la crise des drogues toxiques était une urgence de santé publique.

Photo : La Presse canadienne / Darryl Dyck

Même si elle n’a pas vu tous les détails, Brittany Graham, directrice générale de l’organisme VANDU, qui défend les droits des toxicomanes, estime que le changement proposé risque de léser les personnes qui n'ont pas de logement et vivent dans la pauvreté.

Elles vont être recriminalisés dans tous les sens du terme et il est très décevant, au milieu de cette crise des surdoses où 14 000 personnes sont mortes, que le gouvernement actuel rejette les problèmes plus importants d’itinérance et de pauvreté, et l'état de l'assistance publique sur les individus qui n'ont nulle part où aller, a-t-elle déploré durant un entretien téléphonique.

Selon Brittany Graham, les conséquences du changement proposé mettent en lumière d'autres problèmes sur lesquels le gouvernement devrait se concentrer davantage.

Les gens n'ont plus les moyens de se loger. C'est une question de logement, pas une question de décriminalisation.

Une citation de Brittany Graham, directrice générale, VANDU
Deux personnes sont assises sur le trottoir, dont une femme qui tient une pancarte sur la décriminalisation.

Des Britanno-Colombiens se sont rassemblés le 31 août 2022 pour sensibiliser la population à l'importance de la décriminalisation. Le projet pilote est entré en vigueur le 31 janvier 2023.

Photo : Radio-Canada / Ben Nelms

Le projet pilote de décriminalisation, d'une durée de trois ans, a été adopté le 31 janvier 2023, exemptant les personnes en possession de petites quantités de drogue de faire face à des accusations criminelles.

L'exemption s'applique aux drogues comme l'héroïne et le fentanyl, ainsi qu'à la cocaïne, à la méthamphétamine et à la MDMA, en quantité de 2,5 grammes ou moins.

La province a déclaré vendredi qu'elle travaillait avec Santé Canada pour modifier de toute urgence la politique de décriminalisation afin de mettre fin à la consommation de drogues en public .

Un préjudice irréparable

La demande de la Colombie-Britannique fait suite à des critiques répétées de la part de politiciens, d'agents de santé et de policiers concernant cette politique, notamment la consommation ouverte de drogues dans les espaces publics.

La province avait déjà tenté de rendre illégale la consommation de drogues dans les lieux publics avec sa propre législation, mais l'Association des infirmiers et infirmières en réduction des méfaits (AIIRM) a contesté le projet de loi devant les tribunaux.

Le juge en chef Christopher Hinkson a statué en décembre que, si les lois étaient adoptées, un préjudice irréparable serait causé.

Des drapeaux représentant les vies perdues à la suite de surdoses de drogues sont photographiés lors d'une commémoration en 2022.

Le 14 avril 2016, la Colombie-Britannique a déclaré une urgence de santé publique en raison de l'augmentation significative du nombre des surdoses.

Photo : Radio-Canada / Ben Nelms

Le premier ministre David Eby a annoncé que la Colombie-Britannique avait demandé que les changements proviennent de Santé Canada en demandant une modification à son exemption en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances.

Le changement demandé donnerait à la police le pouvoir d'intervenir lorsqu'elle constate une consommation de drogues illicites dans les espaces publics.

Une voiture de police dans une ruelle du quartier Downtown Eastside, à Vancouver, connu pour sa population itinérante et son épidémie de surdoses.

Le projet pilote de trois ans exempte les personnes en possession de petites quantités de drogue d'accusations criminelles.

Photo : Radio-Canada / Ben Nelms

Corey Ranger, président de l'AIIRM, a qualifié cette décision de totalement contraire à l'éthique.

Nous sommes très préoccupés et croyons sincèrement qu'il s'agit d'un contournement inapproprié de l'ordonnance de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, a-t-il soutenu lors d'une entrevue.

La Colombie-Britannique n'a pas agi de manière transparente et n'a pas consulté les personnes qui seront les plus touchées par ce problème.

Une citation de Corey Ranger, président de l'Association des infirmiers et infirmières en réduction des méfaits

L'AIIRM a publié un communiqué de presse ce mois-ci, affirmant qu'elle avait contacté le gouvernement provincial pour discuter de changements juridiques et politiques.

L'Association demande à la province de déployer des efforts productifs plutôt que de continuer à défendre une loi qui met des vies en danger, indique le communiqué de presse du 16 avril à propos de la loi.

Corey Ranger a déclaré que l'annonce de vendredi a été une surprise, soulignant que la province n'avait pas fourni de réponse officielle à la demande de l'association.

Il semble que sa réponse ait été l'annonce [de vendredi], a-t-il dit.

Une manifestation à Vancouver.

Le 16 janvier 2024, des manifestants se sont rassemblés devant la Cour provinciale de la Colombie-Britannique, à Vancouver, pour soutenir le Drug User Liberation Front (Front de libération des usagers de drogues).

Photo : La Presse canadienne / Ethan Cairns

Corey Ranger affirme que cette demande est une tentative pour marquer des points politiques avant les élections provinciales prévues à l'automne.

Nous devrions travailler à des solutions comme le logement et le soutien en matière de santé mentale, mais au lieu de cela, on a régressé vers la seule chose qu'on connaît, à savoir la punition, ajoute-t-il.

Corey Ranger signale que l'AIIRM n'est pas encore en mesure de déterminer quelles seront les prochaines étapes, parce que ses membres n'ont pas encore vu la demande de la province.

Le Bureau du premier ministre n'a pas répondu immédiatement aux demandes de commentaires sur les critiques.

Des doutes sur le pouvoir discrétionnaire de la police

David Eby a soutenu vendredi que la police avait besoin d'outils pour faire face à des circonstances extraordinaires lorsque des personnes compromettent la sécurité publique en consommant de la drogue.

Un homme debout à un lutrin.

Le premier ministre David Eby a déclaré qu'il partageait les préoccupations en matière de sécurité publique suscitées par le projet pilote de décriminalisation des drogues dans la province.

Photo : justine boulin/cbc

Il a précisé que la police recevra des instructions pour arrêter les personnes pour simple possession uniquement dans des circonstances exceptionnelles.

Guy Felicella, un expert en réduction des méfaits de Vancouver, se dit en faveur de règles concernant la consommation publique dans des endroits comme les terrains de jeu, mais il a encore de nombreuses questions sur ce que signifieraient les modifications de l’exemption, en particulier en ce qui concerne le pouvoir discrétionnaire de la police.

C'est la partie qui me préoccupe et c'est ce sur quoi j'ai besoin de clarté, dit-il.

Ayant lutté contre la dépendance pendant des décennies et ayant fait face à plus de 50 condamnations liées à la drogue, il estime que la recriminalisation ne fonctionnera pas.

Quand on est pris dans tout ça, il est très, très, très difficile de s'en libérer, affirme-t-il à propos du système judiciaire.

C'est juste une porte tournante [de] rinçage, lavage, à répétition pendant des décennies, et je peux vous dire que, quand j'y repense, m'en libérer était probablement la chose la plus difficile.

Il attribue en grande partie son rétablissement aux services de réduction des méfaits.

Sans réduction des méfaits, je ne serais pas en vie aujourd'hui, mes enfants ne seraient pas en vie aujourd'hui et je n'aurais pas passé plus de 11 ans d'abstinence dans mon travail. Mon rétablissement me donne la vie que j'ai aujourd'hui, affirme Guy Felicella.

Mais tout cela reposait sur un continuum de soins allant de la réduction des risques aux services de rétablissement.

Une citation de Guy Felicella

Il s'est dit reconnaissant envers la province qui soutient la consommation supervisée et d'autres méthodes de réduction des méfaits, mais considère qu'il faut une plus grande adhésion des municipalités.

Nous devons leur donner un endroit où aller , conclut-il en faisant référence aux consommateurs de drogue.

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